Dialogue imaginé
- Comment ? Tu parles du même ? Le mari de Julie ?
- Oui. C’est un des hommes les plus pures que j’ai connu.
- L’as-tu vu jamais avec une chemise repassée, un habit et veste tout à fait propre ?
- Veste ? Je parle de lui, pas de ses vêtements.
- As-tu vu son logement ? Plein de bric-à-brac, par terre, sur le sofa, partout. Même sa voiture est toujours remplie.
- Il a des yeux purs. Il ne s’est jamais mouillé dans des combines.
- Mais il paraît toujours négligé.
- Il fait pourtant tant d’efforts. Mais est-ce que tu lui as parlé ?
- Il argument toujours.
- As-tu essayé de le convaincre ?
- Souvent. J’ai renoncé. Seulement une fois…
- Une fois ?
- Il a dit qu’il comprend. Il a laissé tomber la discussion, comme s’il avait pensé toujours comme moi.
- Tu l’as convaincu.
- Mais les autres fois…
- Il défend passionnément son point de vue.
***
- Pas comme Paul ! Il vous donnait toujours raison.
- Ah Paul ! Quel sale type !
- Sale ? Au contraire! Il était toujours propre. Bien habillé, net.
- Est-ce qu’il t’a regardé une seule fois en face ?
- Je crois qu’il avait des yeux marron, non ?
- Troublés, bleu, il nageait en eaux troubles.
- Il avait une manière de noble hautain.
- Un comportement de noble entretenu, ne fils de famille.
- Il mangeait impeccablement, pas comme un porc.
- Il avait toujours vécu sur le dos des autres.
- Il m’a fait une impression propre, nette. Élégant.
- L’as-tu vu ivre mort ?
- Même en titubant, il était encore impeccable.
- Il s’est mis dans tas de salles draps.
- Oui ?
- Et il a tenté de salir tous autour de soi.
- Il disait, que c’était son frère qui…
- Oui, tas d’histoires louches.
- Et il vivait modestement, il m’avait dit…
- L’as-tu vu commander au restaurant ?
- Je lui avais dit de choisir.
- Qu’a-t-il choisi ?
- Un très bon vin.
- Cher ?
- Assez. Oui. C’était sur l’entreprise.
- Tu l’as convaincu ?
- Finalement, c’est Julie qui a décidée l’affaire, pas Paul.
- Il lui a laissé un sacré ardoise. En plus, il a fait des chèques sans provision, et…
- Paul ?
- C’était un individu louche.
- Il m’avait fait une telle bonne impression !
- Mieux que François, si je comprends bien.
- Il marchait tout droit, comme un officier.
- Prusse, profiteur, peut-être même fasciste.
- François ne se tient pas droit, courbe le dos. Il parait toujours froissé comme s’il sortait du lit,. Et avec sa barbe, ses cheveux à tout vent…
- As-tu vu ses yeux ?
- Bleu, souvent furieux.
- Au moins, avec lui, on sait à quoi s’en tenir.
- Je ne sais jamais quand il tonnera, éclatera. Quand le foudre tombera.
- Il se défendra, attaquera. Sur Paul les paroles coulaient sans l’atteindre, il ne répondait jamais en fait.
- Je pouvais parler.
- T’écoutait-il vraiment ?
- Hmm.
***
- Et François, est-ce qu’il t’écoute ?
- Quelquefois, il me surprend avec un grand silence.
- Il réfléchit, considère sérieusement ce que tu dis.
- Puis, il répond. D’un coup, j’ai peur de poids de mes mots, ils deviennent très importants, lourds de sens.
- Oui, je l’ai senti, moi aussi.
- D’autrefois, j’ai l’impression de parler en vent, comme s’il n’était pas là, mais…
- Oui ?
- Quelques semaines plus tard, il y revient. Je me rends alors compte qu’il avait écouté et tenu compte. Il s’en souvient parfaitement. Il a un mémoire d’éléphant.
- Il tient compte des autres. Il aime aider. Il est bon et l’on peut s’y appuyer.
- Ah, oui ?
- C’est quelqu’un de propre, net.
- Propre, net ? François ?
- Intérieurement, là où ça compte.
- Quand même, l’apparence… l’environnement…
- Préfères-tu un filou extérieurement net pour mieux duper les autres, un sale type propre en apparence seulement?
- Non, mais…
- Nous avons, je vois, des opinions très différentes du mot 'propre'.
L’un des hommes brodait, affirmait 'je t’aime' pour mieux endormir Julie, quand en fait il la haïssait déjà. François dit 'je t’aime un peu' mais il démontre cent fois par jour son amour par des faits et gestes qui contredisent le 'peu'.
Lequel est le plus propre ?