juin 1997: je ferme les yeux

Quelque chose manque et rien n’est plus la même.

Je suis encore une fois assise au café, devant moi le grand mur vitrée comme habitude, attendant que la messe finit.

Le ciel bleu clair avec quelques nuages blancs poussés rapidement par le vent. La mairie avec son toit gris, ses fenêtres soulignées de briques rouges, son mur beige est devant moi. La cour, les garages avec leurs grands ports blancs, jaunis par le temps. Les voitures passent, le bord jaune de la route disant : « Interdit de s’arrêter ici ! » L’homme en pantalon et chemise noir avec cheveux argentés entre dans le café.

Stéphanie, assise à côté de moi ne pourrait rien voir de tout ça. Encore heureux qu’elle aperçoit les grands contours. Elle se guide plutôt sur des sons, l’instinct, l’habitude. L’ancienne habitude, quand ses yeux voyaient encore.

Je ferme les yeux. Tous les sons deviennent plus forts.

Une chaise traînée derrière moi me fait tressaillir, la télé débite des annonces débiles d’une voix suave. Les yeux fermés, je sens d’un coup l’homme derrière moi me frôler pendant qu’il passe pour s’asseoir.

J’entends les voitures passer d’un son sourd augmentant puis s’effaçant lentement et je sens le vitre trembler pendant qu’une voiture passe. La musique de télé paraît plus lugubre, les sons plus menaçants.

Le thé plus sucré, plus amère aussi. Je dois tâtonner pour trouver même mes lèvres, trouver la soucoupe est aussi un problème, encore davantage pour le reposer. Je sens le moindre vent causé par un mouvement près de moi.

J’ouvre les yeux. Soudaine, j’ai peur.

Tiens, un couple tout en blanc rentre dans une voiture près d’ici et repart. J’ai peur de rester plus longtemps dans le noir. J’ai ouvert mes yeux. Je le peux. Pas elle.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

oui, je te comprnds... je l'ai fait aussi, je le fais encore de temps en temps .......

Sophos