Il faudrait attendre

Quelques jours, jusque je recupere mon ordinateur ou me connecte au disque de sauvegarde, pour recuperer la suite.

Au plus tard mardi.

Vous voyez, qu'il y a cinq ans, j'etais deja arrive - presque - d'avoir les meme preoccupations que maintenant. Encore une annee et en 2004, l'anniversaire de mon 70e annee et 60e annee de journal intime, des profondes bouleversements spre mieux vont arriver en m'arrachant de tout qui etait vieux pour regarder vers avant.

Je vais continuer ceci jusque-la, mais ouvrir un blog special ne relatant que cette annee charniere encore une fois de ma vie, autour de 70 - et peut etre, je verais, continuer ensuite la mon journal qui n'est pas la meme chose que mon blog et que j'ai continue a ecrire meme si mois souvent apres l'ouverture de mon blog. 

a bientot, peut etre demain je trouve une histoire 0 vous raconter avec une image de 2003 en attendant de retrouver les textes de mon journal

Bla bla sur Staline

5 mars

Et bla-bla bla et bla-bla bla sur France Inter à l'occasion du 50e anniversaire du mort de Staline.

Déjà cinquante ans !

Incroyable…

Presque toute ma vie, depuis.

Que j’ai pu être bête !

Oui, il était comme un dieu, religion, relié à la paix et au bonheur du monde. Je me vois encore il y a juste 50 ans, traversant à pied Bucarest d’un bout à l’autre pour aller chez Edith, les larmes ruisselant de mes yeux et étonnée que ceux autour vont et viennent comme si rien n’était.

Je me souviens de la musique classique lourde diffusée par la radio, un jour, ou trois jours entiers? Encore et encore, de la musique de deuil.

Et pas très longtemps après, la stupéfaction avec laquelle je lus le Scinteia, journal du parti communiste et presque seul quotidien existant alors en Roumanie 'démocrate populaire' relatant les discours du vingtième congrès de Parti Communiste Soviétique. Incroyable! On osait le critiquer! Était-ce possible? Vrai?

Quoi ? Alors, qu’est–ce que c’est vrai? Quoi non? Le doute qui aurait pu me secouer lors l’arrestation au milieu de la nuit de mon père, que j’avais réussi à mettre sur le dos de quelques méchants roumains, incidents de la route vers le bonheur, le paradis vers où l’on se dirigeait, le doute est alors entré en moi.

On expliquait que Staline avait fait des erreurs, causé des dégâts. On n’attaque pas, ne détruit pas un dieu, même être vivant il n’y a pas trop longtemps, impunément!

Hrouschiov, croyant bien faire, levant un tout petit peu seulement la voile, avait fait une erreur irréparable: la petite porte ouverte a laissé le vent frais pénétrer, la brise est devenu hurricane et quelques années plus tard pas grand-chose ne restait des croyances d’antan balayées et contredites par les réalités quotidiennes, aperçus dorénavant avec des yeux plus ouverts.

«La réalité ne pénètre pas dans le domaine de la croyance» j’ai entendu au radio l’autre jour. Vrai. Sauf, quand il y a une brèche, et même alors, tout doucement d’abord, peu à peu.

Un jour, le mur s’écroule.

Trois ans plus tard, lors la révolution hongrois, l’entrée des chars russes à Budapest contre les écoliers manifestants et les intellectuels demandant liberté de parole timidement, rien ne resta plus de mes croyances. Non seulement en Staline et en communisme, mais en politique en général. Pas seulement moi, toute une génération ouvrant enfin ses yeux.

Le terrain ainsi déblayé, la place était enfin libre en moi pour une vraie relation amoureuse. Vivre pour moi seulement et non pour 'servir la cause'.

Trois ans après la mort de Staline, remplis de découverts et divers deuils: la perte d’illusion douloureuse. Trois ans remplis de travail, d’études. Trois longues années suivirent.

Mais depuis, cinquante d'autres se sont envolées!

N’en déplaise monsieur Hue, secrétaire du Parti Communiste en France, malgré son charme et sourire et sa supplique devant le magasin Attac, je n’ai pu voter pour lui. Combien de fois peut-on nous tromper avec le même discours? Plusieurs fois. Mais à un moment donné, c’est d’un coup de trop, et ensuite on n’en croit plus un seul mot.

Que des mensonges! que des bla-bla au radio aussi.

Rêve dans la tête des gens, pour des raisons abjectement personnelles de quelques dirigeants, pires de loin que n’importe quel roi. Et sans pitié.

Je pleure encore. Pas Staline: mes rêves envolées. Détruits. Sur lesquels on a marché avec des bottes. Et on les a écrasé avec des chars. Les rêves et espoirs disparu en fumé. En fumée, tout comme ma cousine Magdie à Auschwitz en printemps 1944. Disparu comme celle de l’amour de mon mari en 1966. Et mes croyances sur Paul et François plus tard.

Ne croyez pas bons gens, sachez! dit le poème de Bächer, mais, dis-je encore (alors et maintenant). Savoir – quoi? Comment?

Profiter du moment ? Du sourire d’un enfant, une brise tiède, une rose éclose ou en bourgeon, un touché ou bisous d’enfant, petit enfant, un bon livre. Un meuble durable. Un ouvre durable.

Il y a des choses qui durent!

Ne pas me laisser décourager !

3 mars 2003

Ne pas me laisser décourager !

Je me sens bien près de Slavia, lui enseigner les AB de l’informatique, déjeuner avec elle, bavarder, écouter ses poèmes, visiter ensemble Paris, une expo ou aller à un pièce de théâtre. Il serait dommage d’y renoncer à cause de ce qu’elle dit sur mes textes. Sur moi, surtout mon écriture.

«Tu es écrivain, pas un auteur. Tu ne connais pas l’instrument, la langue.»

Probablement elle a raison.

Je ne connaitrais jamais assez bien cette langue dans laquelle je vis pourtant, respire, écris, lis (sauf en anglais aussi). Je ne sais plus assez le Hongrois que jadis je connaissais à fond.

Probablement je ne serais pas Auteur avec grand A d’un roman, juste un écrivain. Puisque j’écris. J’ai écrit (en collaboration) deux livres informatiques, réussis, nombreux articles, publiés, j'ai écrit deux courts romans passionnants, achevés, et pendant toute ma vie j’ai tenu un journal témoignant de mon développement et transformation au cours des années et de mes diverses facettes.

Je trouve tout cela plus important que les accords corrects ou non, non déplaise la dame, aimant, elle, jouer dans ses textes avec les mots et leurs sonorités.

Michel est un meilleur correcteur, il m’accepte tel que je suis, le texte tel qu’il veut devenir. Et heureusement qu’existe Stéphanie et son jugement, en général, sans faille.

Pourquoi Slavia essaie de me décourager?

Je l’encourage, lui donnant des notions d’informatique pas à pas, elle pourrait en faire autant. Est-elle inconsciemment jalouse? Elle dit ne pas connaître ce sentiment (envers les hommes).

À suivre, mais attentivement, avec caution.

27 février 2003

J’ai acheté hier de la gentiane, je les planterai samedi, mais aussi des primevères de toutes les couleurs.

Mon permanent très bouclé me donne un visage drôle. Comme pour le début d’une époque, une vie nouvelle! Slavia l’a pris en photo, on verra, mais j’aime bien ce nouveau visage. Avec cette coiffure, je souris pleinement et je regarde de nouveau vers haut. Non pas en regrettant ce qui s’est passé ou plutôt n’est pas arrivé, mais vers avant, avec optimisme.

J’ai donné à imprimer le volume 'Je suis un pauvre mari' un peu de journal mais plus des collages, formant ensemble un tableau. Ce qui c'était passé est encore trop près, la blessure pas encore assez bien fermée pour que je puisse réviser sérieusement. Mais déjà, il montre bien un tournant dans ma vie.

J’ai dû attraper un rhume ou petite grippe, ma langue est aussi tout amer. J’espère pouvoir l’arrêter, ne pas le laisser développer. Je dors mal depuis trois nuits: pourquoi?

25 février 2003

En relisant et recopiant dans le Macintosh les débuts et les fins de mes journaux, je me suis rendu compte que dès mes 12 ans, certainement à 15, je les ai continués - entre autre - pour pouvoir suivre le cheminement de ma vie, mon développement et transformations au cours du chemin.

Sans pour autant arrêter à vivre à cause d’écriture.

D’autre côté, tout en jurant à chaque fois d’écrire la vérité, toute la vérité, non seulement je n’ai pas 'tout' écrite (souvent ne parlant pas d’une chose pourtant primordiale à l'époque), mais pas tout à fait sincèrement non plus.

Quelquefois, embellissant ou carrément changeant la vérité.

Par exemple: 'Mon père était fonctionnaire' écrivais-je à 15 ans, tout en sachant qu’il avait été représentant de commerce puis directeur d’une usine qu’il avait créée pour la même boite. On sent (au moins moi je le sens) l’époque oppressive, me poussant à désirer même que mon père fut plutôt ouvrier ou communiste. Persécuté alors, et pas à mon adolescence.

Malgré les omissions ou demi vérités de temps en temps, l’esprit reste vrai.

De toute de façon, la vérité est fluide. Je peux la décrire de loin, mais est-ce plus vraie que celle d’alors? Tellement dépend de l’angle avec lequel on l’illumine! Et puis, même moi, j'ai vu différemment certaines vérités avec le temps.

***

Hier soir, il faisait 13°C et les premiers pousses de tulipes sont sortis de la terre. Je les ai arrosés, j’attends émue voir ce qui en sortira des semences et oignons mises en terre cet automne.

23 février 2003

Rendez-vous avec Slavia qui nage de bonheur: son imprimante marche, sa liaison Internet aussi. Elle fait des progrès rapides.

À midi, pendant le déjeuner (elle a tenu m’inviter), nous discutons des voyages qu’on voudrait faire. Madrid, Irlande, Roumanie, Cracovie. Nous y sentons presque là. Elle hésite sur l’Amérique.

Irons-nous quelque part? Ensemble ou seules, nous aimons voyager.

Elle me dit: "à la première rencontre, quelque chose se passe – ou non". Sous-entendu, entre nous s’est passé, mais serait-il la même chose entre elle et Alina? Je lui parlais de l’éventualité de retourner à Cluj, y aller ensemble.

ps (2008)
Que des espoirs j'ai mis dans l'amitié naissante, hélas... Par contre, je suis bien allée depuis en Roumanie, et en Irlande. Madrid est encore en attente, mais j'y pense encore.

22 février 2003

Je suis sortie ce matin à sept heures, il faisait encore noir. Le ciel était couvert, mais la demi-lune, jaune pâle, illuminait la rue à côté des réverbères. Les volets fermés sur les fenêtres des maisons dormant encore.

Aucune voiture, même sur la grande rue, ne passait.

J’étais seule, comme si c’était le milieu de la nuit.

— Quand ouvrez-vous ? demandai-je par la seule fenêtre illuminé, de l’atelier du boulanger.

— En cinq minutes. Sur sa montre, il n’était que sept heures moins cinq.

L’air était doux, je me suis promené un peu. Seulement sur une maison les volets ouverts à l’étage. J’ai des volets sur les deux fenêtres des pièces principales, l’ancienne partie de la maison, mais rien sur la cuisine ou salle de bain ajouté. Je devrais y mettre, sinon à quoi servent les autres?

Mais à quoi servent ces volets fermés la nuit et pourquoi le quartier est aussi vide à cette heure? C’est dimanche matin.

Le boulanger ouvre. J’achète une baguette.

Bien fait, s’il vous plaît. Et un croissant.

Au beurre ?

Non.

Il met déjà trop dans 'l’ordinaire'.

Il fait tellement tranquille dehors à cette heure.

Oui.

Mais vous êtes déjà debout à travailler depuis longtemps.

Depuis quatre heures, répond-il fier, me souriant.

Bonne journée!

Chez moi, je prépare le café et un demi pamplemousse, un bout de la baguette fraîche et croustillante avec beurre, je porte le plateau et je prends mon petit déjeuner, comme d'habitude au lit.

J’ai un bon livre. Dimanche commence bien.

Plus tard, quand le soleil les a fait ouvrir (ils se ferment la nuit), j'ai photographié les trois crocus violets ouverts dans mon jardin. Ils m’annoncent que le printemps arrivera bientôt.

My first crocus opens for a few minutes

L’après-midi je me suis lavé les cheveux. C’est bon de se prélasser dans la baignoire remplie d’eau chaud! Le permanent récent me fait des cheveux tout drôles, j’aime bien ma tête entouré des cheveux frisés blond foncé avec quelques mèches blanches. Je me souris dans le miroir.

Je travaillé un peu: j’ai appris à imprimer, sur un papier spécifique, recto verso. Je lirai le texte demain.

20 février 2003

Stéphanie toujours critique de mes écrits, aime mieux mes récits 'frais' que le roman 'précieux' de Slavia que je lui avais envoyé et sa fille lui avait lu. Elle m’a dit seulement hier. Avant, elle a surtout critiqué mes répétitions.

Elles ont aimés mon dernier récit sur mes premiers souliers achetés par moi-même.

Nous sommes allées ensuite ensemble aux Champs Élysée et nous avons bavardé dans un café.

« Il y a deux mois, je ne croyais pas que je reverrais encore une fois les Champs, me dit elle. Je n’arrivais plus à respirer. Marcher. » Elle a 35 kilo en tout! Et bientôt 90 ans.

19 février 2003

Lionel hier matin assis sur les marches intérieures de son logement, ces deux gosses dans ses bras, tête sur son épaule, leur parlant, les embrassant. Il est un bon père et tout à fait lié à eux. Une photo non prise, mais qui est restée dans ma mémoire.

Il m'a accompagné ensuite à la maison.

Plus tard, je suis revenue pas loin de chez eux pour me faire un permanent, ensuite j’ai mangé un sandwich grec au coin de leur rue. Au coiffeur, j’étais nourri du poison: diffusion par le radio du futur paroles des gens appelant et en même temps hurlant contre la guerre d’Iraque. Une coiffeuse arabe, mais surtout je n'ai pas aimé la voix, la haine ressentie autant venant du radio que le fait qu'elle l'a mise encore plus forte quand elle m'a vu grimacer. Je ne retournerai jamais là-bas.

Ce matin je rencontre Stéphanie et lundi je donnerai un cours d’informatique à Slavia. Peut-être un jour elles se rencontreront, sinon ici, dans les pages de mon journal.

18 février 2003

Hier soir j’ai gardé de nouveau Gaby et David. Elle n’a pas encore quatre ans et lui pas tout à fait deux et demi, tous les deux sont nettement plus évolués, développés, que j’étais à leurs âges. Ils parlent mieux, mangent mieux, savent davantage. Ils me remplissent de bonheur et de fierté.

Et ils m’acceptent complètement.

Le soir

(Revenant encore une fois d’eux : ils ont été d’anges cette fois, tellement mignons !)

Dû à une observation de Slavia « Mais vous vous êtes séparés en bons termes?! » et à une explication d’Ostfeld dans son livre sur Fiction et l’importance de faire la paix et éliminer l’envie de revanche du soi pour pouvoir aller en avant, je me suis décidée et j’ai appelé François 'amicalement'. Il paraît qu’il a payé le loyer en totalité et il a promis de m’envoyer le dernier CD photo de l’été 2001. On verra. Mais déjà lui ayant parlé d’un ton agréable m’a mis en bonne humeur.

En fait, après un temps, je l’ai aussi fait avec Sandou, alors… Du moment que je ne dois plus le supporter tout le temps, et qu’il arrête m’accuser de dieu sait quoi encore…

Vendredi Stéphanie arrive. Je viens de recevoir plein de bons livres, dont un sur l’écriture.

(Note 2003 : il n'a jamais envoyé de CD promis, mais tant pis)


17 février 2003

Comment me suis-je tellement embrouillé dans les dates? Hier, c’était le seize et pas le huit février! Comment le temps passe si vite?

Lessing écrivait dans son livre, elle avait 75 ans en 1995 : ce que les jeunes ne peuvent pas deviner est qu’à l’intérieur de peau flétrie se cache un cœur jeune. Comme c’est vrai !

D’autre part, j’ai reçu, à ma demande, les souhaits de cadeaux. Alexandre voudrait un CD Adibou pour PC, Thomas un instrument faisant un bruit moyen, par exemple un synthé, Henry une grande tablette de chocolat.

J’essayerai satisfaire tous.

Il y a 30 à 40 cm de neige à Washington et presque – 10°. Agnès a dû nettoyer le chemin vers la maison déjà trois fois jusqu’à midi, mais elle avait une bonne voix. C’est le plus important: se sentir bien dans sa peau.

8 février 2003 nuit (non, le 16)

À quatre heures ce matin, la lune est entrée dans ma chambre illuminant mon secrétaire antique tout comme à quatre heures l’après-midi le soleil. La pleine lune d’un ciel non étoilée, un seul étoile sur le ciel, pas loin d’elle.

Je ne peux voir beaucoup du ciel d’ici mais je vois au moins ses ombres: les branches noires et vides devant la fenêtre. Mais les prendre en photo, c’est toute autre chose. Il n’y a pas assez de lumière et le flash fait disparaître les ombres et même les rayons de lune.

J’aime le tic-tac du montre au-dessus mon lit et le crissement du stylo sur le papier, les seuls bruits autour de moi dans ma chambre.

J’aime moins, nettement moins, cette dent qui depuis deux minutes me fait mal. Je serais obligée d’aller voir un dentiste et un docteur. Et ne plus gratter mon front sensible, ni mon cuir chevelu irrité. Changer d’oreiller?

7 février 2003

Une goutte de sang au début et le happy end à la fin?

Je me suis réveillée en me disant que mes deux mariages ont dégringolé à partir d’une goutte de sang. À trente ans de distance, l’une, quand j’ai failli perdre mon futur fils, l’autre, perdre l’utérus. J’ai gardé les deux, mais…

Mais non. Dans les deux cas, en même temps, c’étaient en fait mes succès que mes maris n’ont pas pu supporter.

En 1965, j’ai commencé à vraiment être apprécié comme chef de laboratoire et aussi former, lentement, un cercle de bon copains. En 1998, c’étaient les rires appréciatifs fusant dans la nuit pendant la lecture de mon récit sur «le nez» qui ont enragé l’autre, le poussant à se prouver, lui aussi. Mais même son succès à ses concerts ne l’ont pas satisfait, il voulait grimper aux étoiles. Enragé, rien ne devait plus se mettre en sa route et il blessa ainsi tous qui au début voulurent l’aider ou collaborer avec lui.

La deuxième pensée, après avoir lu le poème que je recopie ici, était, que j’ai quand même mon happy end. Pas 'l’amour durable, à jamais', mais de m’être libérée de mes chimères. Libre de ces gens jaloux de tout qui me réussit, libérée de ceux m’étouffant pour se hisser sur mes épaules et me pousser sous l’eau tout en me regardant de haut.

Libre de faire ou ne pas faire, agir selon mon goût.

« C’est une histoire sur l’espérance
C’est une histoire sur l’écriture
C’est une histoire de solitude
C’est une histoire qui serre mon cœur.

C’est une histoire de l’espérance déçue
C’est une histoire de l’espoir revenu
C’est une histoire de l’amitié nouvelle née
C’est une histoire sur la confiance.

C’est une histoire pour vous, pour moi
C’est une histoire… aurait-elle une fin ?
C’est une histoire triste,
C’est une histoire qui finira bien

Je l’espère. »

(Écrite l’été 1998 à Le Châtre, retrouvé récemment.)

Où sont les fins?

Même si je regarde vers le haut, comme à cinq ans, je sais bien que tout n’est pas, n’est plus devant moi, tout n’est pas, n’est plus possible. Mais j’ai vécu, obtenu déjà pas mal et je peux encore pour quelque temps.

Je vais commencer à m’occuper de nouveau des fascicules sur l’écriture, en mettant pour quelque temps la préoccupation avec mes journaux et autobiographie en arrière plan. Slavia, qui au début me disait que je pourrais m’occuper plutôt de l’informatique, lisant le début de Énième chance me dit qu’on le lit comme un roman. Puis elle avait ajouté «de toute de façon, tout vie est un roman.»

Je crois que ma vie n’est pas un roman, mais plusieurs romans.

Il faudrait réfléchir comment la découper pour qu’elle soit captivante, chaque partie, et en même temps dit, laisse le message que je veux. Plus tard. Ce n’est pas facile de décider les fins.

La fin de la première est-ce le poème sur la tyrannie? Départ du pays? Mon diplôme obtenu, malgré tout?

La fin de la deuxième? Rester seule? Devenir auteur best-seller? L’espoir de communiquer?

La troisième se terminera où? Comment? La fin est encore devant moi, puisque je n’aime pas les fins - séparations. Il y a toujours des nouveaux rencontres. Sinon comme femmes avec hommes: avec des activités.

Le mois prochain, réunions APA (aussi Hongrie?), en avril l’Amérique probablement, en mai Roumanie et Alina revenant ici avec moi. Mais déjà dès la fin de ce mois, les réunions pour Lire et Faire lire de Val d’Oise. Contacter le Réseaux d’échange de Savoirs? J’y ai connu tellement des gens intéressants à travers eux! Groupes d’écriture?

Maigrir! Coûte que coûte. Marcher, nager.

Recueillir tout possible encore sur les ancêtres. Rappeler ma tante et mon once, ils ont plus de 95 ans.

Surtout : rester aussi actif que possible.

Bon soir

J’ai décidé d’envoyer le Journal de Katinka tel quel. Attendre pour trouver quelqu’un pour le corriger et m’en occuper encore me pèse trop. On verra plus tard pour le reste.

J’ai besoin de m’occuper d’autre chose, un mois et demi étaient assez à me plonger dans cette passé-là et celle des lettres.

J’irai peut-être chez Agnès pour photocopier moi-même le journal sur Alexandre pendant les Pâques. En mai, en Roumanie. Et quand en Hongrie et en Israël?

Bon soir mon cher journal, cette après-midi les deux petits ont été très mignons et sages, une grande joie d’être avec eux. J’ai pu même imprimer des photos de bonne qualité pour le Journal à envoyer. Malgré leur sagesse, les quatre heures m’ont bien épuisée cette fois-ci.

6 février 2003

J’ai passé le soir d’hier avec David et Gabrielle.

Le petit m’a accueilli aussitôt avec «Va-t-en!» mais ensuite il a joué avec moi ravi de me faire peur – de loin. Tout comme avec Henry, je lui ai expliqué que s’il me touche, je le touche – mais de loin, s’il me menace et ce n’était pas expliqué mais démontré, je fais comme si j’avais peur de ses menaces. Nous avons bien joué et longtemps.

Le soir, après que Gabrielle dormait déjà, David est revenu deux fois et j’ai dû le descendre, le recoucher. Il demandait, suppliant «Avec toi! Avec toi!» et finalement, j'ai dû le coucher dans sa chambre.

Vers cinq heures et demie le matin, Gabrielle est entrée dans la chambre et pour ne pas réveiller ses parents, revenus tard et couchés dans le salon, je l’ai laissé continuer à dormir près de moi. À sept heure et demie, j’ai réveillé Lionel comme il me l’avait demandé la veille et ensuite David apparait et je lui donne à manger.

«Daddy!» son père entre dans la cuisine.

Puis lui demande :

Où est Gabrielle ?

Dans la chambre, elle dort.

Avec qui ?

Elle est venu vers le matin et a dormi un peu avec moi.

Avec toi ! Avec toi ! Pourquoi pas moi ?

Je comprends maintenant que j’avais tort, il y a quelques années, quand un de mes petits-fils de l’Amérique m’avait dit «Va-t-en» et je me suis sérieusement fâchée: combien de fois leurs parents ne l’ont pas renvoyé dans sa chambre, quand, au milieu de la nuit il venait dans leur lit et exigeait y dormir!

Après avoir assez mangé, David a commencé à chanter quelque chose avec 'maman', en ajoutant la prochaine fois 'Maman, Mamie'.

2 février 2003

La mémoire est sélective, la mienne et aussi celle des autres aussi.

François prétendait dans une lettre pendant le procès de divorce que je ne gagnais rien, à Bip, quand nous nous sommes rencontrés. Il a oublié quelques détails.

Nos deux premiers voyages ont été à la charge de Bip, j’espérais encore faire revivre ma société et j’attendais de bons conseils de lui à l’occasion des expos. Mon livre venait de sortir, devint best-seller rapidement et je gagnais, dès la fin de l’année de quoi vivre bien pour l’année suivante. On m’avait sollicité pour écrire une rubrique régulière sur le sujet du livre et c’était fort bien payé et rapidement.

L’année après, en 1990, j’ai travaillé à la formation informatique d'un comité d'entreprise et, même si je n’y ai pas travaillé qu’une semaine ici ou là, on me payait pas si mal et en argent liquide, au noir. L’organisme de tendance communiste dont il dépendait se sentait au-dessus des lois, longtemps. J’ai été finalement éloignée de là puisque je refusais «d’éclairer les masses» des élèves à la place ou sous déguisement de enseignement de l’informatique.

J’ai aussi travaillé beaucoup à faire deux programmes pour l’université. Oui, je gagnais ma vie! Et même les mois quand je n'étais pas régulièrement salarié pendant un certain temps.

Je ne me suis pas appuyé sur lui que pendant un seul mois d’été, dur, pendant lequel il me l’a fait d’ailleurs amèrement sentir.

Mais moi aussi, j’ai le mémoire sélectif et j’aurais pu me souvenir, ou si je m’en souviens de décrire mieux aussi les côtés positifs de chacun des hommes ayant croisé mon chemin.

1er février 2002

Ma fille vient de consentir à copier son journal tenu sur Alexandre et me l'envoyer: cent pages. La quatrième génération. Contrepoint au journal de maman, soixante ans plus tard. Il sera sûrement intéressant.

31 janvier 2003

«Je désire avoir quelqu’un qui puisse dépendre de moi et sur qui je puisse dépendre.»

Non, les romans d’amour sont beaucoup plus que l’eau de rose, ils reflètent souvent nos besoins profonds.

C’est exactement l'absence de ceci qui a rompu en moi le lien entre ceux qui pouvaient dépendre de moi et ne me rendaient pas, plus, le pareil.

Sandou – me laissant malade au lit et allant en Roumanie

Paul – ne m’aidant pas à son tour quand je ne m’en sortais plus financièrement et me regardant ironiquement ayant mal en avion

François –avant, pendant, après mon intervention chirurgical, ne pensant qu’à son informatique et ses concerts, sans aucun souci pour ma santé ou besoins.

Même Pierre, me laissant affronter seul mon mari armé.

Hélas, je n’ai pu dépendre sur aucun d’eux.

J’ai pu dépendre sur mes parents, mes amies – et sur mon fils. Sur ma fille, lors mon premier divorce. Mes parents. Et bien sûr, sur moi-même, de ce noyau dur profond qui s’est formé les premières années de ma vie et m’a aidée à traverser tout.

Merci Papa de m’avoir appris à lutter sale quand on m’attaque, de persister, persévérer, serrer les dents quand je veux atteindre quelque chose. Merci Maman de m’avoir permis à m’épanouir, appris à communiquer, écouter, s’exprimer, créer et accepter que je peux agir comme je la veux tout en assumant les conséquences de mes actes.

Si je devrais terminer mes journaux et ne plus écrire (mais je sais que je ne serais pas capable, car j’ai besoin de me confier au moins à eux), si je le termine pour les faire éditer, je le ferais en citant ce que maman écrivait de moi en 1939 à sa cousine de Budapest: j'avais 5 ans.



ps. Il faudrait que je trouve la citation, mais elle disait que j'apprendrai à dépendre de moi, d'avoir confiance. Quelque chose comme cela.

30 janvier 2003

Il y a logement dégueulasse et il y a pire. Aujourd’hui, j’ai vu le pire. La maison de Maurice, fils de Mme Filipetto. Trois chiens, trois chats et un ivrogne y habitaient.

Les chiens, la sœur de ma voisine, les a déjà donné au refuge, les chats dehors de la maison depuis cette après-midi. La maison n’a que fort peu de lumière. Le sol est sale (crottes?), les pièces puent, aliments moisis, une bouteille sur la table. Une déchéance presque pire que celui d’un clochard sans toit.

Je ne suis pas resté longtemps à l’intérieur, il puait trop, j'ai attendu surtout dans ma voiture, une heure entière. J’ai attrapé froid. L’après-midi, j’ai senti d’abord mes pieds gelés, puis fatigue, puis la gorge qui raclait. J’espère m’en sortir avec une aspirine et thé avec miel.

Devenue héritière futur, j’ai vu la sœur de ma voisine transformée, tremblant pour les sous de sa sœur et l'accusant tous de vouloir la voler. Elle en est devenue laide.

***

J’ai eu aussi une grande joie : j’ai reçu ce matin quelques photos de mes ancêtres par e-mail de Roumanie.

  • Paula jeune, élégante et insouciante
  • Son mari, un peu plus tard, avant de mourir
  • Leurs cinq enfants et leurs femmes avec elle devant sa maison de Gherla.
  • Puis une photo que je connaissais déjà, en 1932 dans le jardin en haut de Cluj, Sidonie avec ses trois enfants et leurs conjoints, et Paula toujours élégante et fière, mais déjà aveugle. Qu’ils étaient beaux ! Ma tante Anci regardant Alexandre avec admiration, Boris regardait oncle Laci avec reproches, maman et papa pleins de bonheur.

C’était deux ans avant ma naissance.

Les réunions de famille avaient continué ensuite avec les enfants, apparaissant chaque année. Suzanne, à la fin de 1932, moi en 1934, Pierre en 1936, Mariette en 1938, Thomas en 1942. Ensuite, oncle Alexandre emporté et mort. Maman trompé. Le reste, six mois au camp de concentration de Bergen-Belsen.

Grand-père, jamais ressorti après le crash de 1933, quand il s’est ruiné pour ses ouvriers. Que cela ait dû être dur pour lui de travailler par la suite pour son propre fils! Ensuite, vivre de charité. Mourir, deux mois après sa fille, ma mère.

Les photos m’ont ravie et fendue le cœur en même temps. Le temps de la jeunesse passe et les temps de bonheur aussi, trop vite. Puis, c’est le tour des autres.

Au moins, ils ont eu aussi ces instants de bonheur qui rayonne de leurs visages.

28 janvier 2003

Hier nous avons eu un faux printemps : 15° et beau soleil. Je me suis promené un peu.

Ce matin j’étais chez Slavia, elle m’a traduit les textes allemands du journal de maman en un quart de tour et m’a prêté la sienne, écrit pour ses deux enfants.

À qui maman écrivait-elle ?

Était-ce pour une autre partie de soi? Pour moi ou ses arrière-petits-enfants futurs? J’espère qu’ils le liront, un jour.

Le soir, je suis allée garder les deux petits anges, ils étaient très bons ce soir et après la vidéo, banane et biberon, ils se sont laissé mettre en pyjamas et se sont couchés sans problèmes.

J’arrive chez moi à dix heures du soir et quelques minutes plus tard Mme Filipetto frappe à la fenêtre. Cette après-midi son fils est décédé.

Elle vient de partir de chez moi, il est onze heures et quart. Hélas, j’avais pressenti en le voyant la dernière fois qu’il partira avant elle. Il avait un diabète, mais il est mort de pleurésie. De négligence, boisson, un seul petit chauffage pour toute la maison, près de son pied, il le déplaçait avec lui avant aller se coucher. Il avait d’argent dans son compte d’épargne, vient me raconter sa mère, mais ne voulait pas s’acheter un chauffage à mazout, plus chaud, qu’elle lui avait pourtant proposé lui payer.

Outre sa mère, il laisse après lui six orphelins : trois chiens et trois chats. Un des trois chiens a accouché hier chez Mme Filipetto, heureusement, sa sœur était en visite est s’en est occupée.

« On m’a téléphoné qu’il était très mal », dit Mme Filipetto encore et encore, «et quand je suis arrivée» et elle fait un geste de caresse avec sa main, «Il était encore chaud. Que deviendrais-je maintenant?» Son fils ne s’occupait plus de sa mère depuis des années, «mais c’était quand même mon fils.»

Elle est partie d’ici quand même un peu apaisée.

Elle doit s’occuper demain, sa sœur de 12 à 15 ans plus jeune viendra l’aider, et les Laurent, voisins d’en face se sont aussi offerts les transporter vers l’hôpital.

Je m’offris à l’aider, au besoin. «Je vous payerai» dit-elle, «je vous payerai» répète-t-elle. Elle n’arrive pas à comprendre que je ne le voudrais pas.

Demain, Lionel aura 39 ans et entrera dans son quarantième et mon petit fils viendra passer la matinée chez moi. Aujourd’hui, il voulait déjà venir avec moi, à la place de se coucher chez lui.

Les nuages. Je me suis rendu compte hier en sortant et aujourd’hui admirant les nuages de la terrasse du 7e de Slavia, puis sortant de jardin ceux gris de soir, que je ne vois presque pas le ciel de ma maison. «On ne peut pas tout avoir,» dit Slavia à mon observation. C’est vrai. Je préfère le sourire de mes petits-enfants. Beaucoup, beaucoup plus importants que les nuages.

Succès en vie ou succès personnelle, j’ai entendu au radio. On peut avoir succès professionnel ou réussir sa vie. J’ai réussi ma vie. J’ai eu assez des succès au travail, relatif à mon ambition où le plaisir de l’action était la plus important, et ma famille longtemps (ou toujours), primait avant le reste.

J’espère que ma voisine ne s’effondrera pas tout à fait avec la disparition de son fils, depuis longtemps malade et, hélas ivrogne.

Elle m’a raconté l’enterrement de sa mère. Son propre pleurésie et six mois d’hôpital à 42 ans. Un mois plus tard, «le total» (enlèvement d’utérus et des ovaires) et, une année plus tard, son bon mari meurt d’une tumeur à l’intestin. Tout ça il y a 50 ans.

Avoir avec qui parler, lui a fait de bien.

«Venez me voir de temps en temps pour dix minutes, je vous payerais». Je ne lui dis pas que cela me vexe, mais j’essayerai la visiter chaque jour, même court.

Finalement, j’ai accepté le petit couvre table roumain que Sandou lui a offert il y a quinze ans et elle n’a jamais utilisé. Non que j’en aurais besoin, mais pour qu’elle se sent mieux. Elle m’aurait ‘payée’.

Non, tout ce que je voudrais, qu’un jour, me sentant seule, quelqu’un me parle un peu. Quand j’avais pleine de chagrin, un jour, une inconnue dans le métro m’avait dit quelques mots extraordinaires: je suis déjà payée!

26 janvier 2003

Je viens de parcourir mes anciens journaux (ceux où je parlais de F. (et j’aurais, sans vouloir pu heurter quelqu’un d’autre), et je suis tombé sur quelques lignes où je parlais à moi-même, vers 66 ans : Ha ha, tu as cru qu’existe un...

Quand j’avais écrit, introduit et imprimé ces phrases, je ne savais pas (seulement l’inconscience se rappelait) qu’à trois ans, papa m’apprenait à répondre 'Ha ha! ' aux phrases non vraies ou perçues comme telles, et «Aha!» quand ce qu’il disait était vrai.

Était-ce une façon (sa façon) de me signaler «Attention, tout que tu entends ou vois doit être filtré, examiné, certains sont vrais et d’autres faux?»

À travers le journal de Katinka, je m’aperçois aussi qu’il s’était beaucoup plus occupé de moi que je ne le croyais – ou que ma mère voulait me faire croire plus tard. Il m’éduquait, lui aussi, à sa façon. Le faisait-il consciemment? ou non? qu’importe. Merci, papa!

25 janvier 2003

Jude Deveraux a raison au début de son livre A knight in shining Armor, "Au-delà du chagrin, douleur, il y a pire: l’absence de l’espoir" Tant qu’il y a l’espoir!

J’ai de l’espoir. Même si l’avenir est en brouillard.

Je viens de relire certaines pages, phrases, écrits par moi dans la lumière de ce que ma mère a écrit sur moi, bébé. "Ha ha!" par exemple, revenant relativement à mes espoirs déçus, relatif à François.

Oui. Il n’est plus J. pour moi, cet homme n’existe plus. Seulement François, fiction, imagination, ayant, heureusement, libéré ma vie, ne pesant plus sur mes épaules pour m’enfoncer davantage encore.

Refaire sa vie après 15 ans avec lui n’est pas facile – mais tout à fait possible! Je le ferai. Il faut de temps, de volonté, de persévérance, de l’imagination et, oui, du courage. Courage venant de l’espoir de futur non perdu.

21 janvier 2003

A-t-on le droit à intervenir dans la vie d’un autre, 'le sauver', l’envoyer ne serait-il que quelques heures d’avance à l’hôpital? Quand faut-il intervenir, quand non?

Nous sommes allées à la maison du fils de Madame Filipetto (elle est ma voisine, je l’ai conduit dans ma voiture). Ivrogne, il paraît plus usé et plus vieux que sa mère de 90 ans. Je ne l’ai pas aperçu aujourd’hui, j’ai vu juste le visage épouvanté de sœur cadet de Mme Filipetto et de ce qu’elle a dû y trouver.

Malade, très malade depuis quelques jours, il n’est pas allé à l’hôpital, ne sachant que faire avec ses trois chiens et trois chats. Nous avons apporté les trois chiens et un sac de camembert passé depuis longtemps ici, en garage de la mère: qu’en ferait-elle?

Elles disaient que les chattes se débrouilleront si on leur laisse quoi manger. Les chiens ont protesté et l’une est même enceinte – de son frère. La troisième est la mère chienne. Et l’homme, survivra-t-il à sa mère? J’en doute.

Après-midi

Je parlais à trois ans, roumain avec Irina, allemand à la maternelle et hongrois en famille.

Mme. Filipetto parlait le patois à la maison pendant que seulement quelques kilomètres plus loin (ils habitaient 20 km de la frontière) on parlait un autre patois ressemblant davantage au français. Avec les autres enfants et 'en ville' on parlait le Piemontois, c’est à l’école à sept ans qu’elle appris enfin l’Italien. Elle a été 'placée' comme boniche à 16 ans à Paris et apprit, lentement, le français. Plus tard, même des mots allemands dont elle se souvient encore: une de ses patronnes était allemande. Elles n’ont pas interné son fils de force, peut-être a-t-il allé de lui-même à l’hôpital aujourd’hui.

Le journal de Katinka me fatigue énormément, j’espère que bientôt le travail sera fini, introduit en ordinateur, corrigé, imprimé et je pourrais enfin passer à autre chose.

19 janvier 2003

Mon journal, ma vie – oui. Je peux l’ouvrir, la montrer, comme je la veux. Mais celui de ma mère?

En recopiant ses quelques dernières lettres, je suis envahie par le doute. Pourtant, il s’agit de moi, surtout l’atmosphère régnant à l’époque autour de moi. Ces lettres l’expliquent mieux que mes mots pourraient, des raisons de certains de mes actions.

De cette distance, quarante cinq ans, ses phrases me font encore mal, lèvent d’anciens fantômes. Je les mettrais quand même avec le reste, ils complètent le tableau, sur ma vie et sur l’époque. Elles m’approchent davantage de maman et de mon père.

C’est de lui que j’ai appris endurer, persister tant que possible, renaître de cendres, continuer et jouir du possible.

18 janvier 2003

Maman dit dans un de ses lettres, vers la fin, que son mari, amoureux d’une autre, avait même 'changé le passé'. Elle n’a pas vécue assez pour savoir que papa aussi avait plus tard revu le passé avec elle et l'appréciée à sa juste valeure. Après avoir été déçu par sa deuxième femme, avide d’argent, fourrures et bijoux, il comprit l’amour vrai et désintéressé de sa première femme.

C’est pourtant vrai – mais fait peur – quand quelqu’un nous déforme le passé, qu’on croyait unique et définitif. En fait, cela change la lumière à travers laquelle nous l’avons perçu quand nous l’avons vécu. Comme la vérité est toujours complexe, on peut en prendre un autre bout - pourtant notre vérité d’alors reste en nous, sinon recouvert d’un centre trop épaisse la cachant.

Tard le soir

Enfin le livre d'Hypercard!Le succès, d’après moi, ce n’est pas d’avoir publié un livre, obtenu un diplôme, créé une société, ou même avoir élevé des enfants, mais d’avoir réussi à survivre des coups psychologiques sérieux.

La destruction de ses rêves, ses buts pour lesquels on a beaucoup sacrifié pendant longtemps.

Plus de six ans pour devenir Ingénieur «homme entier» comme disait mon père, tombé en poussières. Il paraît alors que tout était en vain. Et l’on ne sait pas à ce moment-là que ses six ans ont servi à quelque chose peut-être même plus important à la longue que le but, non obtenu, arraché devant le nez.

En sortir, recommencer à vivre, avoir des joies et plonger dans le bonheur, autre, différent, ça – c’est succès. Non seulement 'survivre', mais vivre pleinement. Autrement.

Une autre destruction était celui de mon rêve de mari et mariage idéal. J’en ai sacrifié aussi énormément, pour finalement échouer. Je m’en suis relevée. Avec amour et confiance en moi retrouvés, une fois ; un diplôme et satisfaction du premier but plus tard.

Aussi, du mort de mon père et ses horribles circonstances, de mon but à rester en Amérique détruit, encore un rêve parti en fumé et je change de carrière et de vie encore une fois, pour créer une entreprise.

De nouveau, combien d’énergie j’y ai mis et comme il m’a fait mal de le fermer, le liquider dix ans plus tard. Pourtant, j’ai su repartir en marchant sur les braises et vers autres réalisations m’apportant aussi de plaisir, satisfaction et aidant d’autres.

On l’a baptisé aujourd’hui 'résilience' mais 'renaître de cendres' et continuer est le vrai succès, c'est connu depuis fort longtemps. Puis, même quand on n’y croit pas, n'y croit plus, quelque chose reste après le feu: on a appris quelque chose qui sera utile par la suite dans la vie.

Je suis trop près encore pour voir ce qui me reste du dernier débâcle et mon deuxième divorce qui m'a obligé aussi de quitter Paris et vers quelle bonne chose je suis en train d’aller, mais j’ai confiance. En moi et dans la vie.

J’ai prouvé plusieurs fois être 'homme' comme l’entendait Kipling dans son poème. On ne s’en sort pas sans être blessé, mais on s’en sort 'et crie victoire' sinon pas pour autre chose, mais d’être survécu psychologiquement.

On essaie de détruire tout que vous avez construit, tout pourquoi vous avez tant œuvré, sacrifié, travaillé, mais il y a un centre en nous qu’on ne réussit pas à atteindre et d’autres facettes de nous fleuriront merveilleusement à cause de celle frustrée.

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2008: aujourd'hui je commence à voir à quoi c'était bon! mais oui, il fallait du temps pour m'en apercevoir!


Le journal de Katinka

17 janvier 2003

C’était maligne effectivement, mais tout a été enlevé, dit le docteur, puis ajouta: mais il faudra contrôler tous les six mois. J’espère qu’ils grandiront toujours vers l’extérieur et pas plus rapidement que jusqu’ici, je me suis dit. Cette fois, j’ai échappé bel, vivante. J’ai eu peur. Pas trop longtemps.

Est-ce dû vraiment aux rayons ultraviolets? Ou m’a-t-on envoyé des rayons causant de cancer dans cette cabane éloigné de tout où l’on m’obligea à passer huit heures par jour ? Je resterai pour toujours avec cette question. Même si je lirai un jour mon dossier de la Securitate, je m’étonnerais qu’ils l’auraient documenté ce qui se passa alors.(1)

J’ai pris mon courage en main et hier matin j’ai traduit les dernières lettres de ma mère et aussi celles de papa. Elle se débattait dans sa «névrose» déformant encore plus la réalité déjà grise, mais surtout, n’arrivant pas penser à autre chose.

J’ai réfléchi et j’ai trouvé la raison que papa ne mangeât rien un jour. Ce n’était pas de peur d’éventuel mariage de sa maîtresse, mais le jour quand on appela celle-ci à la Securitate. Il a dû lui raconter, hélas, des choses qu’il n’aurait pas dû. La future marâtre lui fit par la suite un chantage continue avec son « héroïsme » d’avoir soi-disant rien dit qui aurait pu lui nuire gravement.

Nous savions les mêmes choses, mais maman, même malade, ne l’avait jamais menacé avec.

Dans les lettres de mon père, quel amour! À l’époque en Amérique, je ne me suis rendu bien compte toute la chaleur qu'elles contenaient. Mais c’était l’époque quand enfin, il s’était rendu compte que j’étais adulte et qu’il pouvait me faire confiance. À mes 45 ans!

C’est amusant que dans une de ses lettres écrit à mes 22 ans, maman dit qu’on pouvait me faire confiance d’aller et me débrouiller seule – même en Amérique. 22 ans après, j’y étais en me sortant pas trop mal.

Maman se plaignait de ma paresse : le docteur m’avait dit de l’obliger sortir du lit. Outre son pied et hanche, elle n’en avait l’envie non plus. Au moins, nous le croyons[2]. Non, papa n’aurait pas divorcé si elle aurait vécu – mais, aurait-il faire sortir X ou non ? ça, je n’en sais rien. À l’époque, cette femme avait une énorme influence sur lui, oui, il était fort amoureux. 'Au retour d’âge', mais même plus tard, les yeux plus ouverts, il ne s’était pas rendu compte de toute sa cruauté, méchanceté, ruse emmagasiné en elle.

Je devrais ajouter le récit sur les cendres, pour finir le journal de Katinka. Le ferais-je? C’est une autre histoire.

Avec ce journal et ses lettres, je me suis mise en paix avec eux et le passé. Maintenant, il faudra faire des pas plus décidés vers l’avenir.

Le journal de Katinka est un exemple excellent pour moi où la personnalité du narrateur, pas héros du récit, en ressort, vit et se dévoile avec ses défauts et son chaleur. Humaine. Maman a écrit toute sa vie, elle aussi, même si ses écrits se sont perdus.

Il faudra éviter ceux (celles) qui me découragent d’écrire. Slavia m’a passé aussi son rhume, faudrait-il éviter la rencontrer dans le futur?

Maman écrivait du Secrétaire et combien elle tenait, elle aussi, à ce meuble reçu de sa grand-mère. Le voilà devant moi, resplendissant.


1Ils ont bien tué des chefs syndicalistes de la grève des miniers de cette manière.

2 Où était-ce déjà dû au tumeur grandissant dans son cerveau suite à la chute ?

Journal intime n°10 (32 à 52 ans)


Journal intime n°10 (32 à 52 ans) par Julie70.

Journal intime n°1 de 10 à 14 ans


Journal intime n°1 de 10 à 14 ans par Eric Durand

Le soir

J’ai beaucoup travaillé aujourd’hui et j’ai aussi terminé à lire un bon livre commencé hier.
Après avoir cru, et dit, que moi je n’ai pas reçu aucun cadeau, j’en ai reçu, des formidables.
Annelise, la première en sa bonté m’a offert un journal, un cahier au toucher très agréable. Ensuite, hier, Lionel m’a donné son «coup-vent» chaud et beau. «Un seul problème, dit-il, c’est écrit dessus : Reuter Software.» Tant mieux, j’en suis fière, j’adore, je lui répondis – et c’est vrai. C’est chaud, mince et beau et… c’est de lui. En plus, me rappelle ses succès dans le travail et avec quel sérieux et abnégation il le fait.
En plus, j’ai reçu hier un paquet de ma tante Hanna : le journal de grand-mère « Sorsunk » (notre sort): le photocopie de l’original assemblé en livre et quelques photos en plus allant droit à mon cœur.
Que ferais-je de ce Journal de Katinka? C’est à cause de celui-ci que je n’ai pas décrit (et quel dommage) sur les petits faits et gestes de mes enfants – pourtant j’en ai eu tant de joie d’eux, moi aussi!
Je devrais écrire quelques pages de ce qui s’était passé ensuite. Au moins, jusqu’à 1944. Sur Elly. Traduire au moins une des lettres de maman. Laquelle ? Patience, Julika, patience, même si ceci n’est pas ton forte. Donnes-leur du temps d’absorber le journal de Sidonie d’abord.

12 janvier 2003

J’ai peur de mourir, de plus en plus souvent – mais seulement parce que je voudrais pouvoir terminer mes 'œuvres' - ce que je suis en train d’écrire. Je voudrais encore du temps pour analyser ma vie et arrondir les journaux avec les souvenirs. Tirer quelques conclusions. Servir à quelqu’un qui les lira. J’espère, pour cela, que j’aurai encore un peu de temps.

***

Je me sens 'libérée': Lemac, le chat de mon fils, n’est plus sous mes fenêtres. Lilli a consenti le reprendre pour l’hiver, Ion est venu hier, l’a lavé dans ma baignoire, puis après une visite au vétérinaire. Il constata son piètre état, voulant le mettre sous perfusion (ou le piquer), prédisant peu de jours pour le chat, et finalement, lui donnant des médicaments. Nous l’avons porté chez eux. Je conduisais la voiture, Ion le tenait serré dans ses bras.

Maintenant, il est au chaud, dans sa famille, caressé. Même mon petit fils est allé lui offrir des croquettes. Hier soir, Lilli m’a appelé pour me raconter que tout va bien et mon fils s’en occupe.() J’avais cru, qu’il ne s’intéresse plus à son chat, j’ai découvert hier, qu’il n’y en a rien. Seulement, bien sûr, ses gosses, sa famille, étaient, sont, plus importants.

Cette nuit, j’ai pu me lever, allumer la lumière, sans craindre qu’on battra à ma porte ou miaulera sous la fenêtre. Tranquille aussi, ne me sentant plus coupable de ne pas le laisser entrer, sachant qu’il est au chaud et entouré. Sans avoir besoin, peur, de voir de nouveau ses yeux accusateurs.

Sans s’inquiéter quoi lui donner et pourquoi il ne veut pas manger. En fait, le vétérinaire a confirmé que les chats peuvent rester dehors, s’ils ont où se réfugier au besoin (il y avait la cave ouverte ici), mais lui, étant malade, (depuis longtemps), c’était autre chose.

Bon, il est au chaud, entouré, accepté, je le considérais comme une personne mais je ne l’ai jamais aimé. Je le nourrissais, craignais, luttais avec, le sentais comme quelqu’un voulant envahir mon espace vital – comme jadis François, et luttais pour ne pas lui céder pas à pas comme j’avais, avant.

Un poids est levé de mon âme. Il me paraît un peu incroyable que personne ne viendra ce matin battre à ma fenêtre et exiger à boire.

8 janvier 2003

J’ai plusieurs cahiers près de moi, au-dessus de mon lit.

  • Celui-ci, le journal intime, discussions avec une autre part de moi.
  • Le cahier que je viens de déposer, dans lequel j’ai traduit le journal de ma mère et commencé depuis hier écrire des souvenirs de mes rencontres avec l’Informatique.
  • Le troisième cahier, récits divers de ma vie et celle des autres. Sur les lieux où j’ai vécu.
  • Puis un cahier « sur l’amour » commencé il y a trois ans où j’écris de temps en temps sur ce thème.
  • Et le cinquième, le cahier où je mets ce que je trouve sur l’art et les techniques de l’écriture.

Bien, je dois préparer l’appartement pour la venu des petits, ils ont juste l’âge (deux ans et demi et trois ans et demi) que j’avais quand maman avait écrit son journal sur moi. Ils sont encore "touche à tout" comme j'ai dû être à leur âge.

Je me suis souvenue pourquoi j’avais rejeté ce cahier longtemps! Maman m’aimant tant, n’était pas sans fautes. Aujourd’hui, je l’admets dans son humanité entière admirable et vulnérable en même temps et non une héroïne sans tache.

Je ne les vois pas mes défauts majeurs, mais j’espère qu’un jour mes enfants, me pardonneront mes défauts à moi et me les prendront. Moi et mes écrits, tel que chacun de nous est, avec ses qualités et ses défauts et non pas demandant «rien ou cavalier sans taches.»

7 janvier 2003

Pouf. Annelise a appelé « SOS, besoin de toi pour rester avec David, malade » et je me suis habillé précipitamment et couru là-bas. Enfin, aussi rapidement comme la glace sur la route, le neige sur le pare-brise de ma voiture me les permettait.


Revenue, je me suis mise à travailler sur autre chose. Je viens de m’apercevoir seulement, que je n’ai même pas fini la phrase hier matin.

Et ce matin, j’ai écrit déjà une heure et demie, sur ma rencontre avec l’Informatique. Bon ou mauvais, je verrais plus tard. Mais j’étais en verve, j’ai écrit avec plaisir.

6 janvier 2003

J’ai survécu, je suis toujours là. L’intervention est derrière moi. Je n’y pense plus que rarement.

Je viens de finir la traduction du Journal que Maman a écrit de sa petite fille Julika et de son développement, le deuxième cahier (mais le seul que j’ai), de 1.4 à 3.11 ans, de novembre 1935 à juin 1938.

Tout une vie familiale s’y déroule aussi autour pendant et entre les longes vacances et voyages. Elle ne parle pas d’elle même, seulement en rapport à Julika et très peu des autres, l’ayant influencée dans l’éducation.

Je ne m’en suis pas rappelée ainsi, et en même temps le cahier a réveillé des mémoires profondément enfuis qui ne s’y trouvent pas. Non, je n’ai que des flaches d’images, goûts, couleurs et sentiments de ce temps lointain d’avant mes six ans.

Probablement, comme on le dit, ces années ont été importantes dans ce que je suis devenue. J’ai cherché retrouver (toute ma vie… grand mot !) l’affection et la chaleur de ces années-là, de maman et papa et la vie familiale.

Oui, c’était une famille aisée, voyageant beaucoup de Bucarest, Cluj à Budapest, mais aussi travaillant énormément. Grand père, Emil et son fils Laci, architectes, pour trouver des clients et surveiller les maisons qu’ils bâtissaient pour les autres. Papa, toujours au bureau ou en voyage, pour…