Que faire, maintenant?

Une vraie dillème devant moi. Une volume (en livre) s'achève ainsi qu'une période de ma vie. J'ai envie de commencer un nouveau blog avec mon arrivé en France et mes tribulations divers matrimoniales et autres en plus, ce n'est seulement le pays qui change pour moi.

En plus, au moins, les "trous" à partir de mon départ de la Roumanie, étaient couverts plus ou moins par des lettres. Mais à partir de mon arrivée en France, jusqu'à presque 1968! cinq années entières, sauf un petit note courte, je n'ai pas écrit de journal et, de mes nombreuses lettres vers d'autres, il ne reste rien.

Bien sûr, depuis, j'ai écrit des souvenirs, mais pas une mémoire, seulement des histoires, récits courtes et séparés, sur des sujets et temps de cette période, qui en plus, des fois se récouvrent les uns avec les autres.

C'est bien, la continuation de ma vie, mais pas la continuation de mes journaux.

Pendant que j'ai rempli 9 cahiers en 20 ans, de mes 10 à mon 30 ème année, plus les lettres qui en font au moins un ou deux! dans les années suivantes, notamment, de mes 32 ans à 52 ans, aussi 20 ans d'intervalle, je n'ai écrit qu'un seul cahier, vrai, fort épais.

Publier que mon 10e journal? Mettre d'abord les souvenirs des temps qui manquent (et pas tellement corrigés de français): que faire?

Vous n'êtes pas trop nombreux de venir lire sur ma vie ancienne, mais quand même assez pour que cela compte sérieusement pour moi. Je voudrais votre opinion. J'attends. J'attends probablement jusqu'après les fêtes de fin d'année à décider. Que faire?

2 ans d'Agnès sur le bateau

Juli et sa fillette fêtèrent l’anniversaire de deux ans d’Agnès sur le bateau et à Marseille.[1] Sandou les attendait.

Les retrouvailles furent passionnées, avec la nuit passée dans un hôtel de Marseille. Ils arrivèrent à Saint Didier le lendemain midi 30 octobre 1963, mangèrent pour la première fois un repas (extra!)"ordinaire" français dans le petit bistrot du village (minuscule ville?) avec de jambon en entrée et le vin compris dans le prix du repas.

Le reste, c’est une autre histoire.


[1] C’est ainsi que Juli arriva en France, il y a 40 ans sans savoir que sa famille (arrière grand père de l’arrière grand-mère était partie de la France (Alsace) pour se réfugier en Hongrie (alors Austro-Hongrie) pendant les années de terreur qui suivirent la révolution du 1789.

22 octobre 1963 Givataim

Mon cher garçon,

J’ai parlé avec papa au téléphone, il ira chez le docteur pour le traitement seulement à partir de demain et ne sait pas quand il se sentira assez bien après cela pour partir. Il avait le moral bas et a dit, fais tout tel que c’est mieux pour Toi, et a ajouté qu’il ne veut pas venir aussitôt nous déranger quand j’arrive en venant chez nous et m’a dit d’arranger comment je crois mieux.

Je me suis décidée qu’il ne vaut plus d’attendre et j’ai trouvé un bateau partant le 25 octobre arrivant le 29 à Marseille, il s’appelle Théodore Herzl (de là il continue en Amérique de Sud). J’ai déjà arrangé le billet, maintenant je ferai le visa, nous venons déjà recevoir le vaccin, reste à boucler les valises et envoyer le coffre.

Oncle Dezsö va me transporter partout où c’est besoin, en général tous m’aident beaucoup. Nous allons arranger en quelques jours le logement et ensuite les vieux peuvent venir chez nous ou sinon j’irai chez eux quelques jours. Nous verrons. J’ai eu extrêmement pitié de papa, tellement abattu, après notre conversation, il est triste et probablement souffrant. Réfléchis, toi aussi je te prie, comment faire pour qu’il soit le mieux pour lui.

De toute façon, il ne vaut pas la peine de l’attendre ici, et mon idée d’y aller les voir directement en avion, puis chez toi, j’ai laissé tomber, c’est trop compliqué et difficile et coûteux d’arranger le transport des choses si je ne les prend pas avec moi. Je te prie, occupe-toi de notre voyage et ceux de nos bagages à partir de Marseille jusqu’à la destination. Quand j’apprendrai l’heure approximatif à laquelle nous arriverons, je t’écrirai aussitôt. Demain je vais avec Agnès à Jérusalem ou Nazareth pour résoudre, j’espère je réussirai à la faire baptiser. Probablement nous signerons demain soir pour le logement, avec quelqu’un de sérieux.

Il y aura un peu de hâte ces jours, mais cela vaut la peine. Il est possible que je ne t’écris plus sinon du bateau, je ne sais s’il y a encore de sens mais je t’écrirai encore jeudi. Ma tête est un peu pleine, mais sache que, comme d’habitude, au besoin et dans l’urgence, je suis très calme et active.

Je t’embrasse, au revoir à bientôt,
Judit

De Sandou le 21 octobre

Ma chère fillette, Saint Didier, 21 octobre 1963

Je ne comprends pas comment cela se fait, qu'aujourd’hui je n’ai rien reçu de toi. Samedi, je suis allé prendre la motocyclette que j’ai achetée. Ne te fâche pas, ne sois pas furieuse, 150F avec le moteur abîmé et un autre de rechange. J’ai travaillé samedi trois heures pour la réparer et aussi dimanche de midi jusqu’au soir, je l’ai mise en pièces détachées et je pourrai aller acheter les pièces abîmées manquantes. Avec cela nous avons passé un bon dimanche chez le mécanicien.
J’attendais de tes nouvelles, rien.

Dis à ta cousine que je lui souhaite un bon mariage. Depuis un certain temps, tu n’as rien écrit à propos de ta tante Irène, ni de tes cousines. Je ne suis pas très bon pour leur écrire, envoie leur mes salutations et aussi souhaits de bonne santé, surtout à ton père. Je ne sais pas si tu trouves des motifs pour être fâchée avec certaines personnes de ta famille, mais maîtrise-TOI, dis-toi que tu seras longtemps loin d’eux. Ne prends pas mal que je te donne des conseils, suis-les.

Je vous embrasse toutes les deux,
votre Sandou

Et partout

Mon amour, 21 oct. 1963

Heureusement que je ne t’as pas envoyée la lettre. Enfin aujourd’hui mes règles sont arrivés et je suis de nouveau moi-même. En bonne disposition et calme et heureuse à la pensé qu’en peu de temps nous serons de nouveau ensemble. En plus, il a commencé à pleuvoir, la première fois cette « automne » ainsi l’air s’est amélioré un peu. Il y a trois jours nous avons eu hamsin, qui rend fou même ceux n’étant pas juste avant… Tranquillise-toi donc, tu me recevras gaie et calme et sache que j’ai bonne mine, au moins ce que le monde prétend. Tu auras difficulté à reconnaître Agnès, elle n’a pas changé du visage mais allongé et d’après comment elle se comporte et parle elle parait de deux ans et demi au moins et non pas deux. Ce matin madame Ansel me raconte qu’elle lui a mis ses pantoufles à l’envers et Agnès lui a attiré l’attention « pas bon ! » Avec les couleurs ca va lentement, elle ne les sait pas encore, j’avais pourtant l’impression qu’elle les reconnaissait déjà.

Je parlerai aujourd’hui au téléphone avec papa, je veux savoir quand il arrive et qu’il s’occupe de certains visas pour moi, etc. il coûte 13 lires pour 3 minutes mais il y a des choses pour lesquels je ne peux pas attendre encore six jours pour une échange des lettres.

La pluie s’est arrêtée. Seulement une demi-heure a rafraîchi, nettoyé tout. Y a-t-il vraiment beaucoup de brouillard dans cette région ?


Je t’embrasse sur les yeux et le front
et partout,
Juli
(le bus arrive)...
allusion à ce qu'ils ont fait un matin juste avant son arrivé

Persistance

Mon chéri, 19 octobre 1963

Hier, pour la 4e fois, je n’ai pas réussi à obtenir mon permis de conduire, cette fois-ci, vraiment, avec aucun motif sérieux, soit disant je « ne regard pas assez souvent le miroir ». Cela ne serait rien sinon je regrette l’argent et surtout les nerf dépensés avant l’examen n’ayant pas diminué malgré les médicaments prises. Je ne me suis pas décidée à essayer une 5e fois, je verrai. Au moins, pour pouvoir me dire que j’ai essayé tout ce que j’ai pu.

J’ai par contre une bonne nouvelle, toujours hier, j’ai reçu le passeport. Deux nouveaux locataires sont venus avec des très bonnes références (à vérifier) et je me suis acheté une paire des chaussures « dorés » avec 12 lires pour aller avec ma robe lamée, vert doré. Sans talons[1]. Et un lànc pour aller avec l’autre robe et un tablier pour Anna et un pyjama bonne marché pour Agnès. Elle parle dorénavant couramment hébreux, tu t’étonnes des mots qu’elle connaît et utilise et à leur place. Je suis sûre qu’elle apprendra rapidement à parler bien et seulement en roumain mais il faudra procéder avec elle avec patience. Elle apprendra aussi vite des autres enfants la langue française. Comment s’appelle ce garçon de là-bas de deux ans ?

Depuis que j’ai le passeport je suis plus tranquille. Outre que Nazareth que je veux visiter avec Agnès, il n’y a rien d’important qui reste à faire que papa ne pourrait résoudre, au pire, ou les autres[2] restant ici. De toute façon, nous serons là, pour le Saint Nicolas mets tes chaussures dans la fenêtre[3] à temps ! Je ne sais rien encore de papa, il était voir le docteur seulement hier. Deborah a écrit une lettre disant que nous prendrons des choses en France toi et moi une fois qu’on y sera (meubles), papa n’écrit toujours rien, même pas une seule ligne. J’achèterai ici tout que j’ai besoin, c’est le même. Nous ferons des économies à partir du moment quand j’arriverai là, a propos je préférerais que tu n’achètes pas de moto jusqu’à ce que j’arrive, mon prof de français prétend qu’on ne peut l’utiliser que 100 jours par an là et à cause de la région c’est périlleux. Agnès ne me laisse plus continuer. Je t’embrasse, Juli

Je t’aime, je te désire, je meurs d’être enfin embrassé par toi, J

[1] Nécessaires comme mon mari avait 1 cm moins que moi.
[2] Leur donner de délégation était une grande erreur, hélas.
[3] Habitude hongrois et roumain pour le 6 décembre.

Journée de "repos"

Mon amour,
je reçois chaque jour une lettre de toi et je n’écris que beaucoup plus rarement. C’est une porcherie. Aujourd’hui c’était mon journée « repos ». A six heure du matin levé, Agnès, puis nettoyage et vaisselle, maternelle, courses et envoyer une lettre pour toi, couturière où j’ai acheté une robe transformé à la maison, un permanent chez le coiffeur, retour à la maison avec Agnès, repas, autour du midi et demi est arrivé Miska Nahari qui avait été invité[1] pour demain, me disant qu’il ne pourrait pas venir demain, je lui ai offert bien sur le déjeuner aujourd’hui, Agnès ne voulait pas et elle est sortie jouer dehors avec les autres enfants puis est revenue en me demandant d’aller à la boutique acheter « cordeon » (A-ccordeon) ce que je n’ai deviné que plus tard. Bavardages avec oncle Miska et à deux heures le chauffeur est venu me chercher, je suis revenue à trois et quart et Agnès a dormi jusqu’à 4 et demi, puis j’ai lavé la vaisselle et j’ai reçu une piqûre de B12 chez Klàri, tu te souviens qu’elle est infirmière, et elle a été appelée par une de ses clients et j’ai pris sa petite fille ici. Maintenant un autre vient d’arriver restant trente minutes, déclarant dès le début qu’elle a deux grands enfants donc le logement est petit pour elle, qu’elle a des meubles donc elle le veut tout à fait vide et que c’est dur, mais que malgré tout elle payera 100 voire 110. Exaspérée, je lui ai dit que je demande 160 mais cela ne vaut pas pour elle, que je lui donne avec un minimum de 140 si elle a de bonnes garanties et paye d’avance ou avec 130 et payement des impôts locaux, elle « 120 et impôts » et enfin, elle est partie. A 20 h est venue une autre femme, ayant enfant et mari, qui veut déménager ici avec un autre homme : elle m’avait donné son père comme garant et je suis allée spécialement à Natanie pour vérifier et il n’était pas d’accord du tout avec sa fille. Eh, c’est comme ça.

Maintenant Zsuzsi est arrivée, elle s’était intéressée, la machine à laver vaut 1000 en état parfait neuf et 500 vieux et 400 si ce n’est pas 100% sûre que c’est bon (je lui avais dit ne pas l’employer souvent puisque le caoutchouc est abîmé.) Les autres ne m’offrent pas plus et je ne crois pas qu’elle vaut la peine d’être vendue.

Puis la lumière c’est fermé dans tout le quartier et jusqu’à maintenant j’ai distrait Agnès et Anna (la petite de Klàri), puis je leur ai donné à manger. Ensuite j’ai lavé les culottes, blouses, etc d’Agnès qui se sont accumulés depuis trois ou quatre jours. Puis à huit sont arrivés les autres intéressés du logement et nous avons discuté (je crois que pour rien) jusqu’à huit heure et demie. Quand enfin je voulais coucher Agnès, d’autres sont arrivés, le dentiste, il prendra peut-être le logement mais avec 125 et il est resté jusque neuf. Maintenant c’est ta fille qui me tue qu’elle veut pipi, caca, gâteau, lait, etc.

C’est jusqu’à maintenant mon journée de "repos". On verra ce qui arrivera.

Je mangerai une banane et j’attends que la fillette s’endorme, elle parle avant s’endormir à elle même. Elle vient de s’arrêter, je lui a donné un tourte au miel et je continuerai t’écrire. Tu comprends, ce n’est pas trop facile…

Je n’avais plus patience de rester à la maison et je suis partie à neuve heures avec le bus, j’ai vu un film sympa me rendant le courage. Bonne nuit, à demain je continuerai.

J’ai pris une demie somnifère, j’ai bien dormi jusqu’à six heures du matin, maintenant j’ai pris un demi tranquillisant, bu, mangé et je vais faire les courses, puis à la maternelle et ensuite je prendrai une heure de français (la dernière) et je me présenterai à dix heures et demie pour l’examen de conduite. Je t’enverrais cette lettre de Tel Aviv,

Je t’embrasse, à demain,
Judit

[1] Quelqu’un de très bien et copain de papa.

13 octobre 1963

Mon amour,

Après l’annonce vendredi dans « Notre Vie » roumain et le « Maariv » hébreux, hier et aujourd’hui les amateurs de logement ont tombé comme le pluie. Curieux, avant-hier et hier sont venus tous les roumaines et aujourd’hui ceux lisant le journal ivrit (hébreux). Entre ces derniers il y a davantage des sérieux, le dernier a offert 170 lires, payer les dix mois d’avance (il ne veut pas le prendre plus plus longtemps). Jusqu’à maintenant c’est le meilleur offre, les autres 150 avec trois mois d’avance. Je n’ai pas pu répondre définitivement à aucun comme j’avais promis au dentiste d’attendre jusqu’à demain soir. Demain soir deux revient l’un à 18, l’autre à 20 h pour avoir la réponse. Je ne sais pas trop que faire, mais je me débrouillerai. J’ai réservé aujourd’hui définitivement les billets pour le premier novembre ce que veut dire le cinq ou six nous serons à Marseille et nous nous verrons enfin après 4 mois et 10 jours de séparation. Vraiment je compte déjà les jours.

J’ai reçu aujourd’hui tes lettres de 4 et 7, à partir de maintenant je te prie envoi-les express, le temps qui nous reste cela ne coûtera trop d’argent en plus et elle arrive en 3 jours au lieu de 6, ce qui paraît dorénavant une grande différence. Par exemple, tu m’écris que tu as reçu ma lettre de 2 octobre et tu veux répondre, je n’ai plus aucune idée de quoi il s’agissait dedans et s’il est encore actuelle. J’ai l’impression qu’une siècle s’est passée depuis. Je vais annoncer aussi la vente de la machine a laver, dans le Maariv de vendredi. Pour le moment personne ne veut donner même pas 700 pour elle.

En 1936, Leon Blum a fait une lois et depuis c’est ainsi en France, que tout le monde, absolument tous les ouvriers et fonctionnaires travaillent 40 heures par semaine. Pourquoi diable travaille-tu 50 ? Je n’aurais pas cru qu’il te mettront à travailler dix heures par jour ! !

Agnès, après tant des vacances est très heureuse retourner à la maternelle, aujourd’hui sur le chemin j’ai rencontré une connaissance et elle lui a crié en passant :
« Ani holehet la gan, salom ! »
Je vais à la maternelle, bonjour!
et elle continua son chemin.

Elle est difficile à coucher, surtout quand les visiteurs tombent quand elle est presque endormie. Enfin, maintenant, à neuf heures de soir, elle dort.

Je vois d’après la lettre que toi aussi en a assez de la solitude. Moi aussi. Mais ils passeront, tel quel, ces jours aussi. J’attends chaque jour recevoir le passeport Israélien et vendredi j’irai voir ce que je peux faire pour l’accélérer. Je t’envoi des baisers mon chéri, bonne nuit,

Judit

Tu me manques énormément!

11 et 12 (envoyé le 13)

Mon chéri, je suis maintenant seule avec toi. Il est vendredi soir 9 h 30, Agnès dort, la maison est silencieuse. Les journées me paraissent de plus en plus longues comme si elles ne voulaient plus passer du tout, le temps d’arriver enfin être ensemble.

L’impatience a grandi et moi je suis de plus en plus nerveuse. Surtout que papa est venu avec cette idée d’avion ce qu’en plus de prix triple, les poids des coffres, changement d’avion à Paris, m’ont provoqué des jours énervés. Finalement même le frère de papa dit qu’il reste tel décidé avant et me conseil de partir avec le bateau aussi vite que j’arrive à arranger les affaires, avant le 1 novembre. J’ai fait un compromis, si papa veut contribuer au voyage je prendrai une place un peu meilleure mais bien sûr classe touriste quand même. Le problème d’examen m’a énervé aussi et la solitude, et tous ces fêtes m’empêchant faire une chose ou autre et m’obligeant de rester avec Agnès toute la journée (depuis dix jours avant les fêtes de nouveau des vacances). Je peux la confier de temps en temps ici ou là mais pas pour longtemps. Mais après-demain tout rentrera de nouveau en état normal. Le docteur de l’assurance maladie dit que je serais trop maigre et même aurais des problèmes au cœur, mais la réalité est que je suis nerveuse et j’en ai tout à fait assez de cet état des choses. Je n’ai plus de patience pour que les jours passent et ce qui me manque le moins et l’arrivé de papa maintenant par dessus tout, il est resté en Europe une demie année et il aurait pu rester encore une mois. Tant pis, c’est son affaire, si c’est assez pour lui à ne pas me voir que dix jours.

Je lui ai écrit que je veux qu’il nous achète certains des choses promises[1] et j’espère qu’il a bien compris de ma lettre que seulement ensemble avec toi ou qu’il te donne de l’argent et que tu les achète. Il ne m’a pas répondu encore, n’a pas eu ni le temps.

J’étais très fâchée qu’il peut donner 200 dollars en plus et n’utiliser que l’avion pour leurs déplacements (et me disant en pus dans sa lettre : qui t’a mis en tête d’aller en bateau ?) pendant que moi je me casse la tête et me demande est-ce transformer une robe avec 35 l ou acheter plutôt deux chaussures pour Agnès ? Cela me passera aussi. Comprends-moi bien, il ne s’agit pas de nous, de notre famille, il s’agit des relations entre papa et moi. De toute façon, je n’ai pas pu oublier un seul second ce que me racontait Deborah, la bonne, avant son départ d’ici, en parlant soi-disant de la fille de Stern : « elle travaille depuis ses dix-sept ans et n’est pas gêné à recevoir de son père. » Par contre, tant oncle Bela comme tante Irène leur paraît tout à fait normal (ainsi qu’à Ila la sœur de Deborah) que papa leur donne de l’argent et qu’ils leur apportent pleins de cadeaux. Je suis sa fille – et je suis convaincu que maman me dira à lui demander davantage et qu’il fasse (accomplisse) ses promesses maintenant et non pas plus tard.
Oh, mon garçon, qu’il serait bien que tu sois un peu près de moi et pouvoir parler un peu ensemble. Tu me manques beaucoup, énormément, sauf ta fille je n’ai personne vraiment près de moi, seulement toi.

Bon nuit, j’ai un peu mal au cran, j’essaierai m’endormir. Bon nuit, mon cher garçon.


Ce matin j’étais chez Ila jusqu’à dix heures quand leurs amis sont venus les prendre à la mer, puis chez Irène jusqu’à midi quand ils sont partis visiter un ami malade. Tous ont été heureux d’Agnès, mais moi je me suis sentie encore plus seule. Et quand j’ai demandé mes deux cousines pourquoi elles ne viennent plus maintenant au moins pour ces derniers temps, Irène a sauté pour les défendre comme une mère lionne. Tant pis. Même cela passera.

Revenant à la maison j’ai trouvé un papier des gens qui ont déjà visité l’appartement me demandant les rappeler et ils sont venus à midi et demi, puis d’autres qui paieraient 160 et quatre mois d’avance et à deux heures un autre qui disait qu’il reviendra à six heures pour le montrer à quelqu’un d’autre. Je vais le louer finalement, d’après ce qui parait. En suivant les conseils de Laci[2] pour dix mois et ensuite encore dix. Un dentiste qui déjà été trois fois veut en faire un cabinet dentaire et logement et offre 150 et une avance d’une année entière puis 160 par mois, mais il disait qu’il viendrait avant-hier soir avec sa femme, j’ai attendu, personne n’est venu. Mais aussitôt que je sors pour trente minutes, hop, quelqu’un était venu et ne m’a pas trouvé là.

Que cela doit t’être dur là-bas ! Mais j’arrive aussitôt que je peux, encore un petit peu et nous serons ensemble ! Nous avons l’impression dorénavant que non seulement 4 mois se sont passés mais beaucoup plus[3], n’est-ce pas ? !

Je t’embrasse, envoie des baisers,

Kimondathatlanul vàgyodom utànad ! (en hongrois) :
J’ai horriblement (inderscriptiblement) envie de toi

[1] Promis déjà à ma mère pour quand je me marierai.
[2] Voisin avocat et mari de mon amie Zsuzsi.
[3] Encore maintenant, 40 ans plus tard, j’ai cette impression.

8 octobre 1963

Mon chéri,

Je t’écris pendant une pause de travail, à partir du lieu de travail, mais je n’ai pas des bonnes nouvelles. J’ai de nouveau tombé et cette fois ayant un examinateur sympa près de moi. Il m’a donné une mauvaise note parce que pendant un seconde je pensais au lieu d’être attentive, autrement, dit-lui, j’allais très bien. J’y vais de nouveau en 18, je suis devenue dorénavant « une habituée de la maison. » J’espère le passer finalement. Sinon, je pourrais prendre un permis Belge[1] avec lequel je crois on a le droit de conduire en France, au moins pour une année. Autre mauvaise nouvelle est que je ne crois pas pouvoir partir le 20 octobre, je crois pouvoir y aller (le plus tard) autour de 1 novembre.

Il fait une chaleur étouffant et humide, il sera temps que ça refroidisse, le soir on peut encore respirer, mais hélas pas chaque soir. Nous sommes en bonne santé et j’essayerai vendre la machine à laver et je voudrai beaucoup obtenir l’argent de loyer pour demi année, pour le moment beaucoup viennent voir et partent. Chacun avec autre chose, l’un le voudrait vide, l’autre plein, etc. etc.

Pour le travail, jusqu’à maintenant quatre jours complets, j’ai reçu 160 lires aujourd’hui.
J’ai fini presque toute la cuisine, sélectionnée, mis déjà à côté dans le coffre, sauf les assiettes, tes outils et mes livres de cuisine.

Pardonne-moi que je t’ai écrit ainsi, mais tu sais comment sont les patrons, même si tu n’a rien à faire et étant obligé à rester en allongeant le temps que tu restes chez eux, ils te regardent de travers. Pourquoi tu n’occupes pas le « temps vide » avec autre chose, ils ne sont pas contentes. Il m’a battu à la tête aujourd’hui jusqu’à je ne pouvais plus en me demandant au moins vingt fois : « N’est-ce pas que la dernière fois c’était plus mou » « Plus homogène » « Est-ce bon à jeter » et d’autres observations ressemblants au moins vingt fois sinon trente. Je l’avais prévenu dès le début que la matière première n’est pas bonne, mais que peut-être il sortira quand même. Et j’ai l’impression qu’il est exactement sorti comme la dernière fois. Mais c’est vrai, c’était son temps, il me payait, donc j’ai resté calme et je me suis comportée comme un docteur avec son patient. Le travail a réussi.

Revenant à la maison j’ai trouvé ta lettre de deux octobre. Je t’ai déjà écrit sur l’examen. Si j’y vais pas le 18 je pensais d’y aller une fois encore avant mon départ. À cause de cela j’ai choisi de prolonger le départ pour 1 novembre même s’il y a d’autres nombreux motifs. Entre autres, outre le logement qui ne s’est pas encore résolu, je veux aller à Nazareth après 26 octobre[2] ce qui serait nettement plus sage.

Hier j’ai envoyé encore deux jupes à Gabriella et la chemise de nuit, tu auras dû me dire qu’elle a 40 ans et quand, je viens seulement de l’apprendre par sa lettre.

En ce qui concerne le grand tapis[3], je l’amène, je te l’ai déjà écrit.

En ce qui concerne les pièces basses, j’ai lu dans un revu qu’en peignant le plafond d’un couleur plus claire que les murs, la chambre paraît plus haute. J’ai fait la même dans ce logement, les murs crème et le plafond blanc crème et je crois qu’ils ont raison et dans la chambre d’Agnès, vert clair et avec le plafond presque blanc, on voit encore davantage qu’ils avaient raison.
Le lit que le patron nous prête est-il double ?

S’il te plait, retourne-moi les lettres de papa.

Je n’ai pas pensé une minute à louer l’appartement sans garanties, hélas, avec les uns qui m’ont plus j’ai hésité trop longtemps (150 lires, j’espérais plus) et ils ont pris ailleurs. Maintenant j’ai fait paraître une annonce dans un journal hébreux (Maariv) et une autre dans l’hebdomadaire roumain et comme ces derniers l’ont publié avec des fautes la dernière fois ils vont le répéter. J’ai été au docteur avec Agnès, pour au revoir, la fillette s’est développé très bien, dans une seule mois elle a grandit de 6 cm et a pris bien de poids, elle a maintenant 11,2 kg et 84 cm hauteur. Il m’a dit que tout est en ordre avec elle et m’a donné un médicament pour le prendre une seule fois (moi 5 pastilles, elle 1) pour nous guérir complètement des oxyures. J’ai été aussi au gynécologue et elle m’a donné des conseils et des prescriptions puisqu’en Franc n’existe pas de curetage ni des moyens de contraception et il faut que je suis prévenant à prendre d’ici tout dont j’ai besoin.

En même temps que ta lettre j’ai reçu une de papa disant qu’il arrive à Tel Aviv autour de 15 octobre et me proposant de partir avec l’avion parce que ce n’est pas bien avec le bateau l’hiver et j’arrive plus vite et, éventuellement, que je sois encore avec lui ici, à la place des quelques jours passés sur le bateaux. Je vais me renseigner combien coûte et dure l’expédition des affaires maintenant, en avance, et s’il est possible qu’ils arrivent en temps et alors papa payera le billet d’avion (ou au moins la différence), à ce moment-là, pourquoi pas ? ! Je leur donnerai les grands oreillers dont nous n’avons pas besoin, demain je recevrais l’édredon d’Agnès confectionné à partir de l’oreiller ayant les meilleurs plumes.

Si je pouvais obtenir une prolongation de mon passeport ancien, tant mieux, sinon je devrais aller à Bruxelles[4] pour résoudre là. S’il te plait, intéresse-toi comment c’est le mieux que j’y aille : directement à Bruxelles et de là-bas avec les papiers en règle chez toi ou on pourrait le prolonger tenant compte du tien en France ? Que crois-tu ?

Je t’aime beaucoup et je ne pense (pour le moment) pas à divorcer,
Je t’embrasse,
Judit

[1] Il n’y avait pas d’examen a passer là – ce que j’ai fait finalement.
[2] J’espérais recevoir une certificat de baptême antidaté de deux ans.
[3] Les enfants d’Agnès ont grandi sur le même tapis.
[4] J’avais un passeport de réfugié politique.

Mon amour

je te prie aie de patience encore un peu et nous serons ensemble et avec un peu de chance jamais nous ne nous séparerons pour un temps si long. Je me rend compte comme il te doit être dur n’ayant personne près de toi qui puisse te dire un bon mot.

Je ferai tout maintenant à dépêcher au moins avec un jour si possible la « réintégration » de notre famille.

Je viens de regarder les photos de l’album ensemble avec ta fille et nous eûmes fort envie de ta présence. Toute la matinée (il est deux heures et demie d’après-midi) j’ai pensé à toi.
Que faire avec l’appareil à moudre ? Envoyer, apporter, laisser chez papa ? Et tes outils ?
Agnès a observé que je t’écris et elle a voulu aussi écrire et voilà. Par hasard cela ressemble à une tête mais crois-moi elle l’a fait absolument seule. Le reste, à gauche est le bateau sur lequel nous partirons vers toi aussi tôt que possible.

Aujourd’hui toute la journée j’ai triée les affaires (l’après-midi), j’ai mis dans le petit coffre pour papa ce que je veux laisser, les grands oreillers (n’est-ce pas que nous ne les utilisons pas ! ?) et les couches d’Agnès (nous en aurons besoin dans 2 –3 ans) et les livres choisis et l’argenterie que nous ne voulons utiliser maintenant et le lingerie que je ne voulais pas prendre. Le reste des vêtements choisis et lingerie j’ai mis dans le grand coffre pour l’envoyer, avec les petites oreillers, édredons, serviettes, nappes, pyjama et chemises de nuit, mon manteau, tes chemises, les photographies et les lettres et la champagne d’Agnès[1]. J’attends que les couvertures que je viens de laver sèchent et soient mises et aussi nettoyer (moi ou quelqu’un d’autre) les petits tapis et ajouter aussi les livres que je viens de désinfecter. Je ne sais pas si après tout cela il y aura encore de place pour quelques vêtements, robes, je verrai.

De toute façon, ensuite j’ai mis Agnès dans le baignoire et pendant qu’elle se lavait avec l’éponge elle a dit : «Agi mare. Agi spala ha bait sel ima»

(Mi-roumain – mi-hébreux : Aghie grande. Aghie lave la maison de maman)

et elle a lavé la baignoire et le mur au-dessus, pendant que j’ai lavé mes foulards et les petits affaires d’Agnès. Ensuite je l’ai couché et j’attends qu’elle s’endorme.

J’ai un peu mal au dos (tu sais déjà que j’ai toujours mal quelque part) mais je suis très contente des réalisations de cette journée. J’ai l’impression d’être déjà plus près de toi avec quelque chose et aussi de notre départ.

Dimanche matin viennent ici Irène et Violette et nous allons nous consulter sur ce que vaut la peine d’emporter et ce que je jetterai entre mes affaires personnelles et ensuite je vais les donner à la couturière ou nettoyage. Une partie j’ai déjà mis à côté, ils ne sont plus bons mais pour le reste des vêtements j’ai besoin de l’assistance.

J’ai l’impression que j’ai fait déjà le gros. J’ai encore la cuisine, la salle de bains, etc. pour demain. Il n’est que huit, mais j’espère qu’étant tellement fatiguée je m’endormirai vite, de toute façon je me couche et je continuerai parler avec toi en moi et te donner des baisers en pensé, mon chéri, mon cher garçon très fort aimé et désiré, à demain.

Samedi je ne t’ai pas écrit, j’ai lavé, arrangé, fait les paquets en continuation et avec chaque chose ajouté dans le coffre je me sentais plus près de toi. Tu verras comment le coffre est rempli, il reflète ma pensé que c’est toi qui l’ouvrira et mon souhaite qu’il te fasse plaisir. J’ai trouvé tes bottes, te sont-ils bons ou devenus trop petits ? Dois-je les prendre ou les offrir ? Dommage qu’on n’a pas le droit d’envoyer des chaussures en Roumanie. À propos, j’ai reçu une carte postale de sa sœur disant qu’elle a reçu la jupe et lui va bien et qu’elle est heureuse avec ». Si tu n’as pas écrit, il n’est plus nécessaire de le mentionner, avec le temps elle recevra aussi les autres.

J’ai laissé Agnès à la maternelle et dans peu de temps mes tantes arriveront pour discuter chiffons. Ils étaient bons chacun dans son temps mais ils sont maintenant démodés et certains (je les ai essayé hier) paraissent même ridicules. Que faire de la mode féminin changeant ainsi ! Beaucoup entre eux je les est depuis dix ans au moins et probablement en dix ans ils reviendront à la mode mais cela ne vaut pas la peine de les tenir jusque là, n’est-ce pas ! ?
Mon chéri, je t’embrasse, je t’envoie un baiser et encore un baiser et je te serre fort et avec plein d’amour. Que je puisse les faire enfin en personne !

Je ne sais pas si je t’ai dit combien Irène s’est réjouit de ta lettre, elle me l’a raconté au moins trois fois jusqu’à maintenant par cœur, écris-lui encore.

Je t’embrasse encore et encore, baisers,
Juli

[1] Reçu de sa naissance « pour ses fiançailles.

4 octobre 1963

Comme tu le disais, mon amour, avec ta lettre de minuit trente tu as réussi à me rendre malade. Bien que je l’ai reçu le midi, je n’arrive plus à dormir. Plaisant rêves, dis-tu, bien merci. Si tu es près de moi, je te tourne le dos et je m’endors aussitôt (quelquefois) mais autrement, comment diable pourrais-je dormir.

Tu vois pourtant que je fais tout pour qu’on soit ensemble le plus rapidement possible, que veux-tu de plus ? Ne me fais pas de mauvais sang, mon garçon ! Viens ici, je te fais de place près de moi. Et je me retourne, juste pour faire semblant. Ne peux-tu venir ainsi près de moi ?

Eh, mieux vaut parler des choses « pratiques » ou au moins, actuelles. Je donne l’examen de nouveau lundi à 7 et demi, si je ne le passe pas je m’inscris pour le 21 et partirai seulement le 25 ou 26, si je passe cette fois, je commande le billet pour 20 octobre. J’étais à Zim, le coût est la même qu’au bureau de voyage mais il n’obtient pas de visa. Je suis allée au consulat français, si tu n’a pas de billet aller – retour, obtenir un visa est difficile, donc cela vaut la peine de passer par l’Agence de Voyage qui l’obtient à ta place. J’irai à « Mundus » , l’autre est antipathique et ne vaut pas deux sous. Celui-ci paraît une agence sérieuse et bien informé et ils m’ont promis de résoudre les visa avec le billet aller seul.

J’espère, sinon avec plus, louer l’appartement avec 150 l, la moitié avance, alors je me suis résolus les problèmes financières, je ne vends plus rien et je les prend avec moi. J’étais à la douane, je peux prendre ce que je veux. Et si je les prends avec moi sur le bateau il ne coûtera pas beaucoup. Je ne descendrai pas à Genova, surtout parce qu’Agnès n’est pas encore assez grande pour une longue voyage en bus, qui sait quoi encore. Même sur le bateau il ne sera pas très facile, mais elle se trouvera des admirateurs comme elle est très amicale.

C’est un peu difficile avec papa, Ila dit qu’il ne se sent pas très bien, doit voir le docteur de nouveau au milieu du mois et probablement suivre encore un traitement douloureux et Ila dit que c’est vrai qu’il ne supporte bien le froid et qu’il devrait revenir au plus vite possible ici. D’une autre côté, naturellement, il voudrait être avec nous le plus possible – moi aussi d’ailleurs – je ne sais pas comment résoudre ceci, je pensais qu’il pourrait venir chez nous ou nous rencontrer à Bruxelles s’il sera absolument besoin que j’y vais personnellement pour arranger les histoires de passeport. De tout façon, je veux demander une visa française, un belge et un suisse, les avoir, puis on verra. De toute façon, invite-les. Je sais qu’il sera mieux juste nous trois, mais, que dire, tu comprends toi aussi, puis ils repartiront et nous resterons seuls, ensemble.

Je les ai écrit deux longues lettres sans recevoir aucune réponse pour le moment. Dimanche six sera l’anniversaire de papa et je lui ai envoyé un télégramme mais pas écrit.
Avant-hier j’ai pris cinq glaïeuls pourpres de toi à moi, j’en ai porté aussi trois chacun à Irène et Violette aux repas des fêtes. Elles commencent à s’ouvrir seulement aujourd’hui, elles sont très belles.

Hier Irène et Violette ont été ici est elles ont beaucoup aimé le logement. Il paraît même qu’il « sent » propre (personnellement je n’aime pas cette odeur de chaux).

Par contre, j’ai réussi à partir aujourd’hui en oubliant d’éteindre le feu sous la casserole (les voisins entrant par la fenêtre l’ont fermé) et la cuisine sent à fumé, encore heureux que rien ne s’est passé, ni les murs, ni le plafond ne se sont pas couvertes de trace de fumé. La voisine dit « quand quelque chose brûle, c’est la chance qui arrive. »

J’étais ce midi aux associés d’Hermann et j’ai reçu 120 lires pour 3 jours travaillés auparavant et j’irai mardi et encore une journée, l’argent gagné sera bienvenu ! Sinon c’est très agréable et sentimental : regard cet argent est vraiment à moi, je les ai gagné par mon travail et mes connaissances. Comme ingénieur chimiste ! Dis, autour de là-bas, n’y a-t-il pas un quelconque possibilité, une besoin de chimiste ? De toute façon, pas pour le début, je veux d’abord rendre agréable notre foyer et je ne peux pas laisser non plus seule Agnès au début dans un lieu nouveau pour elle. Dans le livre c’est écrit qu’à partir de 2 à 2 1/2 les enfants sont le plus « enfant de maman » en se tenant près de la jupe et ne veulent pas la laisser. Donc ce n’est pas seulement elle ainsi, mais en général.

J’écris, je t’écris mais je suis encore troublée.

Peut-être tout simplement je n’ai sommeil ayant bu un expresso vers onze heures. D’habitude je dors l’après-midi avec Agnès et le soir me couche une ou deux heures plus tard qu’elle. Elle s’endort maintenant autour de huit et demi même si je le mets au lit plus tôt.

Au revoir, pour le moment, au plus tôt possible, J
Je t’envoi encore une baiser aujourd’hui, dimanche 6 octobre.

2 octobre 1963

Mon cher garçon,

j’ai étudié avec attention, enfin en tranquillité le plan de la maison et je crois que la pièce n° 3 sera notre chambre à coucher. Le n°2 ou l’entrée ou la chambre d’Agnès selon les possibilités de chauffage et comment on peut l’entendre quand elle nous appelle, mais pour nous il serait encore préférable qu’elle dort dans le n°1. Et, comme tu l’as dit, le n°4 est la cuisine – salle à manger.

À quoi sert la grande salle du bas ? D’après ton dessin, si j’ai bien compris, chaque pièce a seulement une seule fenêtre, n’est-ce pas ? Le 1 n’était-il pas une pièce pour les provisions ? Que veut dire « palier » ? Pièce par où on passe ? On verra.

Comme je prévois peu des meubles, nous pourrions nous limiter à utiliser seulement deux des quatre pièces. Mettant un vestiaire près de la douche, un lit pour nous en 4 et pour Agnès en 3 quelque chose qui pourrait être pour elle aussi la pièce « de jour ». Ou alors le 1 pour Agnès, le 4 pour nous tous. Rien dans le reste. Mais cela n’ira pas puisque je vois qu’il faut absolument passer à travers le 3 pour aller aux toilettes, donc on ne peut pas le condamner. Éventuellement, elle pourra servir juste pour passage. On verra surtout comment on peut les chauffer l’hiver.

J’ai trouvé un couple voulant payer seulement 150 par mois mais ils ont une garantie bancaire. Pour le moment, je demandais 170 mais si je ne trouve pas des « sérieux » comme tu l’écris, je leur loue à eux. Le logement leur plait. Je le crois bien, après la peinture et mis par terre les tapis, (tant le grand que les petits lavés), et toutes les couvertures (ressortis express de nouveau du coffre) et les vases, bibelots, tout propre, c’est vraiment beau maintenant.

En ce qui concerne tes lettres, j’ai deux à la fois ou rien, cette dernière « express » écrit en 26, reçu le 29, peut-être quelque chose tombe aujourd’hui, pas demain puisque c’est férié, le premier jour de « shoukot ».

J’étais à la douane ce matin, je peux prendre tout ce que je veux avec moi, même la machine à laver et le grand tapis, si je voudrais même le mixer. Il n’y a aucun restriction , juste mettre sur le passeport les appareils électriques pour pouvoir les ramener sans payer des taxes de nouveau à retour (ce que je ne crois pas que sera notre cas). Je me suis achetée hier une bague de « diamant » coûtant 1 lire, mais c’est belle, si on le regard de loin il donne l’illusion que ce n’est pas de glace. Il me plait beaucoup, plus que si j’aurais dû donner 30 lires. Quelle importance «original, véridique » ou non, au moins ainsi je n’aurai pas peur qu’on me le vole.

Ila m’a dit en revenant que tous ont été très impressionnés quand tu as remis 100. J’espère que j’obtiendrai 6 mois de loyer payés d’avance et je pourrais ainsi couvrir ma voyage. On m’a déjà offert quatre mois. On verra.Je voudrais apporter quelque chose de petit à tous autour de toi, de notre futur. Patron, épouse, enfant, ouvriers, etc. avec qui t’es en contact plus près. Ecris-moi une courte caractérisation de tous pour comprendre ce qui leur fera plaisir……
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Agnès s’est réveillée, à sept heures, a bien mangé du pain beurré et bu du lait, puis mangé un peu d’aubergines et carottes. J’ai cuit d’autres aubergines et une soupe avec des ailes de poulet, entre temps, elle lisait et dessinait dans le livre et… aie ! d’un coup je vois qu’elle a dessiné avec rouge sur le mur fraîchement peint. Je l’ai battu, elle est sortie dehors, a pleuré, elle est allée se plaindre à Silberbous (qui l’aime beaucoup comme elle ressemble à sa fille quand elle était petite). Ensuite, elle est revenue disant qu’elle ne le fera plus, je lui ai pardonné et aussitôt elle a couru dehors heureuse. J’ai repeint de nouveau cette partie du mur (les peintres m’ont laissé un peu de peinture) et on ne le voit plus.

Bientôt il sera neuf heure et je partirai pour ma leçon auto et expédierai cette lettre. Combien des fautes de grammaire et d’orthographie doivent contenir mes lettres ! Et oublie de caractères surtout, je me dépêche quand j’écris puisque les pensées arrivent plus vite et le main peut bouger plus lentement.

Je t’embrasse mon chéri,
Arrête-toi, toi aussi un moment et imagine-toi comment serait, comme je suis maintenant, et alors… il n’y a plus besoin que j’écrive rien d’autre,Baisers, Judith

Vendredi, 20 septembre 63

Mon amour !

Tant hier qu’aujourd’hui j’étais invitée pour le repas avec Agnès chez Violette, puis chez Irène. Notre fillette s’est comporté comme une grande personne. Étant dans cette atmosphère familiale je me suis rendu compte plus que jamais combien tu es seul maintenant et combien cela doit t’être dure.

Je suis convaincue, mon amour, que le plus tard à 15 octobre nous allons pouvoir partir d’ici et de toute façon, pour l’anniversaire de deux ans d’Agnès nous serons ensemble.

Je me suis mise sérieusement au travail en sortant les affaires tel que tu m’a écrit et avec un contrôle très sévère. Tout ce que je considère qu’il nous faudra dans un futur éloigné je le mettrai dans une coffre et je le laisserai à papa. Les plupart des choses nécessaires dans un an ou tout suite je les envoierai à Marseille, Lyon (ou direct à St. Didier ?), mais je me renseignerai si les prendre avec nous sur le bateau ne revient pas moins cher, sinon déjà la semaine prochaine, après que j’ai nettoyé, repassé tout, je l’expédierai. Je pensais que s’il y a une pièce en plus, on peut le transformer en garde-robe en y installant provisoirement à la place de l’armoire des éléments de rangement. Je ne sais pas s’il n’était pas préférable de acheter plutôt une grande cuisinière à gaz (avec l’argent de papa a promis) qu’un petite. Où serait-elle difficile à transporter plus tard ? Fais comme tu crois. Si tu crois, écris-lui « faisons une surprise à Juli achetant le… » sinon achète un le moins cher possible, seulement qu’il soit facile à entretenir, nettoyer.

Il y a beaucoup des affaires que je vendrais, offrirai ou jetterai puisqu’il ne vaut pas la peine de se traîner avec des chiffons après nous. J’ai fais une révision même entre les livres et j’ai choisi seulement ceux absolument nécessaires. Le reste on pourra les prendre plus tard. Je pense d’un coup à la chaise d’Agnès où elle mange très bien, mais si tu pourras procurer là-bas une table et deux petits chaises et une chaise haut pour quand elle mangera avec nous (dorénavant sache qu’elle ne va pas nous déranger, elle mange seule et proprement) il sera mieux. Je ne crois pas prendre la poussette non plus ou oui ? Même si nous ne l’utiliserons que quelques mois pour le moment c’est très utile pour des distances un peu plus longues. C’est plus facile que dans les bras.

Je t'embrasse, J.

St Didier ne figure pas

Mon amour, non seulement à moi mais tu manques aussi à Agnès qui a dit hier matin sans que je lui rappelle : où papa ? je veux papa. Elle était très contente quand je lui ai raconté que bientôt nous irons chez toi, mais elle aurait voulu partir sur le champ. Mes règles sont arrivés, hier c’était le jour d’avant, tu peux t’imaginer comment j’étais.

A combien des kilomètres est Lyon ? Je t’envoie ce que j’ai trouvé sur elle. Par contre St. Didier ne figure pas sur cette carte puisque il n’a pas de succursale du Crédit Lyonnais, je crois qu’à cause de cela. Probablement il n’y a ni train ? Est-ce bien si j’envoie les paquets jusqu’au Lyon ? Où mieux en direct ? Réponds-moi à ceci rapidement. Je pense que je mettrai ce que je n’ai pas besoin dans le coffre dès maintenant, le grand , étant plus léger même que le petit.

J’attends beaucoup qu’on soit ensemble, mon amour, n’est-ce pas miraculeux qu’après toutes ces années de connaissance nous avons envie l’un de l’autre et nous nous aimons plus que n’importe quand ! Peut-être aussi parce que maintenant nous nous imaginons un peu idéalisés, toi moi et moi toi. Moi je te vois comme le fiancé avec qui je m’embrassais, m’embrassais – et c’était tout. Oh que j’étais heureuse ! Puis… c’est bien autrement nous séparer un jour ou deux, mais pas tant. C’est vraiment exagérer.
Je voudrais tant te serrer dans mes bras, mettre ma tête sur ton épaule, te donner des baisers, baisers sur tes lèvres de nouveau et encore,

Judit
Agnès dit elle aussi : maison, papa, et je lui parle de toi souvent.
Nous t’embrassons chaudement toutes les deux, J et Agnès

Persévérance

Chéri, 16 sept. lundi soir

Ceci sera la dernière lettre pour quelques jours, demain je l’enverrai en urgent, après-demain est le soir de nouvel an et jusqu’à dimanche la poste est fermé, donc n’attend pas en recevoir. Bien sûr, je t’écrirai entre temps, mais je ne pourrais l’envoyer que le 22.

J’ai tombé de nouveau aujourd’hui, je ne pourrais dire que mon moral est très haut, je repasse l’examen le trois. J’ai persévérance mais je suis désorientée : l’un des chauffeurs dit que je conduis bien et il n’y a rien plus à m’apprendre, tandis que l’autre est un porc, un chien. J’ai l’impression de bien conduire mais chaque fois j’ai trop d’émotions et je me trompes là où d’habitude tout va bien. Cette fois le moteur s’est arrêté au départ sur un côte et je me suis embrouillé en changeant de deuxième en première comme si je n’aurais pas su. Hier tout allait si bien pourtant et aujourd’hui sur le chemin jusqu’à ce moment-là et la grande circulation ne m’a pas dérangé. Que pense-tu, devrais-je encore prendre des leçons ? ou devrais-je prendre un médicament contre l’émotion avant l’examen ou quoi diable. Je ne voudrais partir d’ici sans permis. Est-il difficile de l’obtenir là ? Je ne comprends pas bien ce qui se passe, à la fac au contraire, au moment des examens tout que j’ai jamais su me revenait. J’irai voir demain de nouveau ce qui se passe avec le passeport, ce que je devrai faire. Jeudi et vendredi nous sommes invités chez Irène et Violette.

Je ne crois pas que cela vaut la peine d’acheter un frigidaire pour le moment au moins, l’hiver. As-tu fait les comptes avec la patronne ? Combien elle a pris pour les repas ? Combien a coûté l’accident ? Quelle couleur est par terre ? Y a-t-il W.C. et l’eau courant ou non ? Est-ce près du moulin ? Qui d’autre habite dans cette maison ? A quel étage est le logement ? Ne fais pas comme à Suici, puisque je viens n’import comment.

Le patron du chauffeur maigre voudrait louer le logement pour une année (il voudrait pour deux mais pour le moment je ne le veux pas plus) on peut le prolonger plus tard. Je peux vendre la machine à laver au chauffeur, sa femme vient d’avoir une petite fille. Renseigne-toi combien coûte. Je crois qu’il sera bon d’expédier déjà la lingerie, les vaisselles, les couvertures, les édredons, etc. tout qui ne me manquera pas jusqu’à notre départ pour qu’ils arrivent avant ou en même temps que moi. Cela prend de temps. Il faut que je m’intéresse combien coûtera l’expédition. Je donnerai le grand tapis à Ila, elle me donnera une autre là-bas. Y a-t-il des pièces aussi grands ? Vaut-il la peine de prendre les rideaux ? La lampe chauffante ?

Ici il le chaleur continue sans répit. Deux jours c’était « frais » 28° mais il s’est réchauffé aussitôt. Je me mettrai sérieusement au travail, ranger, départ, etc.

Bonne nuit, mon amour, je continuerai demain matin,
bonne nuit,
J

Mon amour

14 septembre 63

Mon amour, (Julie à Sandou)

Ne me punis pas à cause de trop de questions en ne m’écrivant pas. Tu n’as qu’à ne pas me répondre à mes questions, mais écris-moi. Mercredi j’ai reçu quelques lignes de toi disant que tu m’écriras de nouveau le soir et depuis j’attends.

Mon oncle Adalbert m’a montré dans le journal, ce que tu dois savoir d’ailleurs, que le gouvernement français a pris des mesures contre l’inflation, et entre eux, c’est aussi de laisser dans le pays entrer une plus grand nombre d’immigrés, j’espère cela t’aidera maintenant, utilise-le pour obtenir la prolongation et le droit de travail, maintenant quand c’est «la ligne».

Demain examen de conduit, j’ai peur, j’y étais déjà deux fois et l’autre chauffeur m’a critiqué sans cesse, disant que je ne change pas les vitesses à temps, que je signale trop tard, que je dépasse, ne conduis pas assez à droit, etc etc. Je verrai demain.

Je ne sais pas pourquoi, depuis quelques jours Agnès ne veut plus aller à la maternelle (elle veut rester avec moi) le matin. Je ne comprends pas ce qui lui a pris. Quand je pars le matin elle pleure fort, mais un à deux minutes après elle joue bien. L’éducatrice est très contente d’elle. Autrement elle parle de mieux en mieux et mange bien et seule ces derniers temps.

J’ai commencé prendre des leçons de français d’un très bon livre, Cours Mauger de Langue et Civilisation Française à l’usage des étrangers, éditions Hachette, Paris. Pour le moment j’ai attaqué le volume I mais je vais rapidement puisque son début pour moi c’est plutôt répétition de ceux appris déjà en Roumanie. Essaie te l’acheter toi aussi tu le trouveras sûrement à Lyon et étudie-le toi aussi. D’après ce que je vois il est très pratique. C’est aussi bon à autre chose : je l’utilise aussi pour dormir. J’apprends le soir jusqu’à j’ai sommeil (avec cette méthode cela ne dure pas longtemps !)

S’il te plait, ne me tiens plus tant des jours sans correspondance ! Et n’oublie plus une lettre à moi chez papa : il a trouvé une lettre à moi adressé à Anniko dans laquelle j’écrivais de Déborah, comme ci comme ça et il me l’a envoyé dans sa dernière lettre sans commentaires, c’était très désagréable.

Je t’embrasse chaleureusement,Juli

St. Didier, le 16 septembre, 1963

Chère enfant, (Sandou à Julie)

Aujourd’hui après avoir bu mon café, j'ai rencontré le facteur. Tu es une femme si adorable. J’ai signé, j'ai pris ta lettre et j’ai lu. Je viens de recevoir aussi une lettre de ma sœur Gabriella, elle a reçu les jupes que tu lui as envoyées et t’en remercie, elle va t’écrire aussi à toi, mais souviens-toi que pour la première lettre de Roumanie il faut beaucoup de temps, à cause de la censure.

Je me réjouis de tes deux décisions, le Français et la gymnastique et je serai content si tu les mets en application. J’espère que tu as réussi ton examen de conduite et je te prie de demander à ton père d’envoyer les médicaments à mon frère. S’il te plaît, ne prends pas trop de somnifères, ni d’autres médicaments, plutôt casse quelque chose ou crie sur tes voisins.

Je t’embrasse ma fille chérie et aimée et je t’envoie un long et appuyé baiser sur ta bouche, à bientôt, ton Sandou

Tu as eu raison

jeudi 12 septembre 63

Cher Sandou,

Je te prie de me pardonner, mais tu as eu raison. D’après ce que je vois on peut le résoudre sans que tu ailles à Paris, d’après ce que j’ai compris hier J (je vais de nouveau le vérifier aujourd’hui) si la Police me donne une certificat que tu es à l’étranger (j’ai déjà demandé et je l’aurai dans une semaine) cela prendra place du papier envoyé par toi. N’y vas pas donc si tu n’y as pas encore été. Sinon, cela ne fait rien, ta lettre arrivera sûrement avant celle de la Police et c’est au moins aussi bon. Quand j’étais la première fois il ne me l’a pas dit mais peut-être c’est ma tort n’ayant pas demandé s’il n’existe pas d’autres moyens. Je retourne vérifier si ceci prolonge seulement le besoin de ta lettre ou l’annule.

Je t’embrasse avec chaleur et fort, j’aurai tellement besoin de toi mon homme, mon ami, mon garçon. Beaucoup d’amour et j’espère qu’au maximum dans un mois et demi nous ne reverrons. Papa reste à Zurich encore jusqu’au 20 octobre.

Judit


Mon chéri, 12 sept. 63
Je t’ai expédié ce matin un télégramme et une lettre, maintenant je t’écris de nouveau. Je pensais n’était-ce pas trop ? Ensuite je me disais que je supporterais volontiers de toi une lettre par jour, pourvue que tu écrives ! Je pensais combien je suis heureuse recevant la poste et je m’imagine que cela ne peut pas être très différent chez toi non plus. J’ai de toute façon des problèmes à discuter avec toi.
A peine je ne suis couchée cette après-midi et j’ai commencé à t’écrire une lettre dans ma tête que j’avais l’intention de mettre sur papier le soir et je te disais dedans que trois jours se sont passés et il n’y a rien de toi, quand quelqu’un sonne et je trouve accrochée sur la porte une lettre de 9 septembre, je lui avais demandé de le mettre là n’ayant pas le clé de la boite à lettres. Immédiatement j’ai fait la paix avec toi, et au lieu de dormir, je t’ai écrit de nouveau dans mon esprit une autre longue lettre. Puis je me suis couchée et je t’écris au moins une partie de toutes mes pensées.
Je suis revenue de la poste centrale, et sur la route, j'ai achetée deux belles jupes en tergal à Axa en leur demandant qu’on les emballe joliment (je dois avouer que les autres quatre expédiés, mises en paquet par moi, n’étaient pas si bien empaquetés) obtenant non seulement meilleur qualité et exécution au même prix qu’avant. Je regret n’avoir pas acheté les autres aussi chez eux. Puis je suis allée à la poste et je les ai envoyés en Roumanie.
Il faut remplir un tas de formulaires tellement que même avec mon écriture rapide cela m’a pris une demi-heure. Avec l’expédition par avion tout a coûté environ 44 lires et j’ai entendu qu’on peut les vendre maintenant là-bas avec 600 lei la pièce et la douane est 100 lei. Ceci vaut donc vraiment la peine. Il peut être un aide essentiel aux vieux. Je me suis décidée que n’importe quoi arrive j’enverrai deux chaque mois régulièrement. Je suis seulement soucieuse, comme je leur ai envoyé les premiers en juillet, le deuxième début août, je n’ai aucune nouvelle qu’ils les ont reçu et Zsuzsi Samuel dit qu’il dure au maximum deux à trois semaines jusqu’on les reçoit.
Je te prie demande discrètement à tes parents s’ils l’ont reçu, s’ils leur plait ou devrais-je envoyer quelque chose d’autre. J.

Echange de lettres

Julie à Sandou

Mon amour, 10 sept 1963
Je rien reçu de toi, ni hier ni aujourd’hui, mais je t’écris sans plus attendre. Je pense à vous tout le temps, monsieur, je ne dois même plus mentionner, n’est-ce pas, mais en plus, souvent je parle avec toi, soit en me querellant, soit demandant pardon, ou comme ci ou comme ça.
De toute façon je vais demain voir, peut-être ils prendront le papier que tu m’avais envoyé tel quel. On verra ce qu’ils disent combien cela durera, de quelle façon cela prend moins de temps.
Aujourd’hui j’ai conduit avec oncle Bela derrière et il était contant. On verra ce qui se passera à l’examen. Je suis décidée le prendre au besoin 4 à 5 fois jusque je passe. Le prof dit que je conduis mieux que beaucoup qui passent.

Hier j’étais chez tante Hanna avec Agnès et cette fois-ci elle s’est bien sentie et nous nous sommes bien entendues. Aujourd’hui nous étions chez Irène, elle ne voulait plus rentrer ! Agnès ayant lavé la lettre de ta maman je n’ai pas pu te l’envoyer. Je regrette. Elle dit dedans combien elle est contente que j’ai obtenu avec l’aide de Dieu et Papa le logement. Elle l’a écrit exactement ainsi. C’était une lettre datant depuis un mois que Stelian avait oublié d’expédier. J’irai encore une fois à Nazareth avant notre départ, peut-être même à Jérusalem et je voudrais voir d’autres endroits par ici avant partir.

Julie



Ma chère femme, 14 septembre 1963

Ce matin j’ai reçu ta lettre du 10, je l’ai lue d’abord sur l’escalier, et puis de nouveau et de nouveau, jusqu’au ce soir. Tu es tellement douce que je te mangerais, encore et encore, jusqu’à ce qu’il ne reste rien.

Aujourd’hui je me suis levé tard, parce que cette nuit ils m’ont réveillé à 4 heures du matin pour un dépannage au moulin. En me levant, j’ai trouvé ta lettre, dans laquelle tu réponds à presque toutes les questions que je t’ai posées seulement dans ma lettre d'hier. Probablement par télépathie.

J’ai réglé enfin mon compte d’Août avec les propriétaires du moulin. J’ai reçu encore 380 francs, 120 f représentent la bouffe et l'acompte de 300 f. Je les ai déjà terminés aujourd’hui, je n’ai plus que 10 francs. Ils m’ont donné aussi le compte des dépenses. Je devrais publier une annonce par l’intermédiaire de Eduard, l’ami de mon frère habitant à Nantes.

Je dois faire quelque chose, l’insécurité me détruit.

J’ai encore 225 F, mais j’aurais voulu m’acheter une paire de chaussures. J’ai aussi besoin d’une blouse de travail, bêtement je n’en ai pas pris quand je suis parti. Toutes mes affaires sont sales et je devrais les donner à laver. La dernière fois, à Paris, ils ne les ont pas trop bien lavées, mais ils ont très bien repassé mes chemises.

Moi aussi, j’ai des problèmes pour dormir. Aussitôt que je suis un peu reposé, je me réveille et je ne réussis plus à m’endormir. Peut-être est-ce de la télépathie, qui sait.

J’ai reçu une lettre de mon frère, il a trouvé un meilleur travail, il ne m’a pas oublié et il nous demande des nouvelles des médicaments qu’il avait demandé de lui envoyer, je crois que tu avais demandé à ton oncle de le faire. J’ai aussi reçu une lettre de mon copain d’enfance grec, il est sorti de Roumanie après moi, il s’est établi comme médecin au Nord de la Grèce et me demande comment c’est pour les docteurs en France. Je n’ai encore écrit à personne d’autre qu’à toi et je devrais aussi laver mes chaussettes. Je voudrais aussi aller au cinéma.

Quand je terminerai ma lettre, je ferai une promenade pour la mettre dans la boîte à lettres et je mangerai un gâteau. Ici le temps s’est refroidi, il fait frais et il pleut. Je pensais que, si tu étais ici, on ne pourrait pas se promener et qu'il faudrait trouver quelque chose à faire à la maison.
“Ensemble pour le meilleur et pour le pire!”

Je vois que lorsque nous sommes séparés c’est mauvais, quand nous étions ensemble c’était bien. Depuis deux mois et demi déjà que dure notre divorce forcé, on pourra se remarier, je ne sais pas pour combien fois. J’espère bientôt.

Beaucoup de baisers pour ma femme dont j’ai beaucoup envie et pour la petite.
Je t’embrasse mon amour, j’espère que tu ne dérangeras pas mon sommeil cette nuit,
Votre Sandou

Lettres écrites au même jour

lundi 9 sept. 63

Mon cher Sandou,

J’ai reçu aujourd’hui tes lettres de 3 et 7 septembre. Je me suis réjoui de la première d’abord, du deuxième je me suis fâchée fort. Si tu veux coût que coût repousser que nous soyons ensemble, c’est ton affaire. Encore 7 jours, puis encore.

Moi, je t’avais écrit clairement. Vas à Paris, c’est loin, coûte de l’argent. Je le sais. Mais comme nous n’avons pas pensé à temps, pendant que t’étais encore ici, tu ne peux rien y faire. Tu dois signer personnellement et devant le Consul ce papier. Autrement il n’y a aucun valeur. Si j’obtiens le passeport sans enfant (dans environ un mois), puis je donne le papier, il peut durer encore un mois jusqu’à ce qu’ils ajoutent elle aussi. Donc mon garçon mets-toi au travail et vite.

Je viens d’arriver de Nazareth, j’ai visité l’église (grec -) orthodoxe d’annonçement, où nous avons été ensemble et après-demain peut-être j’irai le montrer aussi à Agnès. Il était un jour avec hamsin d’horrible chaleur, je suis partie à sept heure trente et rentré à quatre complètement épuisée. J’ai peur qu’on aura des difficultés plus tard. On m’a dit qu’il y a à Jérusalem aussi un prêtre roumain orthodoxe (mais pas d’église), j’y vais demain pour essayer de le trouver.

Je pourrais partir dès aujourd’hui avec mon ancien passeport si je le voudrais sans enfant. Donc si tu veux voir ton enfant plus rapidement, fais comme ton épouse dit et n’essaie pas de trouver des solutions plus commodes, mais impossibles. Qui va croire « par correspondance » que c’est bien toi qui leur ai écrit ? Tu pourras à Paris en même temps faire prolonger ton visa avec trois mois et aussi donner une annonce au journal et alors tu ne feras pas le long chemin « pour rien ». On ne peut pas aller de Lyon avec avion ? Il serait sûrement plus vite ainsi !

Je t’embrasse mon chéri et termine et même épuisée j’irai expédier, je veux qu’elle t’arrive vite. Peut-être depuis ils t’ont écrit eux aussi d’aller en personne et disent les jours quand s’est ouvert et le Consul disponible pour que tu n’ailles pas quand ce n’est pas bien.

Je t’embrasse avec beaucoup de désir,
Judit

Sandou à Julie

9 septembre 1963, St. Didier
Ma chérie, le réparation de la voiture que je leur ai abîmée, je te l’ai envoyée aujourd’hui le détail, cela n’a pas été un accident très réussi à ce point de vue, le coût est approximativement égal à mon salaire pour deux mois.
J’ai aussi discuté avec eux de mobilier, nous aurons une table, des chaises, une armoire, un réchaud à gaz et un chauffage. Ils ont aussi un lit d’enfant pour Agnès, mais, si tu ne le veux pas, apporte le sien. De toute façon c’est moins cher que d’acheter ici, dans le futur proche nous n’aurons pas beaucoup à dépenser. Comme tu crois. J’aurais encore eu beaucoup à t’écrire, mais en relisant ta lettre j’ai commencé à rêver comme un adolescent et je suis resté là.
Tout ce que je dois payer pour la voiture abîmée me fait peur, mais je n’ai pas d’autre issue, elle était assurée seulement pour les tiers et ils insistent pour utiliser seulement des pièces neuves. Avec ton examen pour le permis de conduire, j’espère que tu auras le papier en mains lorsque tu recevras cette lettre. Je préférerais que tu ne loues pas une voiture mais de toute façon ne prends pas Agnès avec toi. J’espère que ton père tiendra ce qu’il a promis, et, alors, quand nous serons ensemble nous nous promènerons un peu partout. Mais si tu dois passer encore une fois l’examen, le mieux est de ne pas interrompre les leçons.
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J’ai interrompu ma lettre et j’ai été au cinéma voir un film espagnol, moyen. Puis j’ai emprunté une radio et je ne l’ai rendue que ce matin, puisqu’ils m’ont demandé de travailler dorénavant de sept heures à midi.
Les patrons ont été toute la journée à la chasse.
L’après-midi j’ai lu et dormi et au dîner, ils m’ont donné un tout petite poste de radio qui marche assez bien et me solutionne les leçons de français. Je pense souvent au trou financier que j’ai causé et j’en deviens malade (de rage). Avec ces 1800 francs j’aurais pu m’acheter une bonne voiture d'occasion. Sans parler du fait qu'au début nous allons avoir des dépenses journalières supplémentaires et aussi pour la mise en route de notre ménage. Je crois que jusqu’à ta venue je pourrai arranger la maison pour pouvoir passer l’hiver sans problèmes. N’oublie pas de t’habiller bien chaudement et d’apporter le radiateur pour la chambre d’Agnès. La semaine prochaine la laverie du village s’ouvre et je pourrai enfin donner mes affaires à laver, je n’ai plus qu’une seule chemise propre.
Quand tu viendras, rappelle-moi de ne pas faire d’heures supplémentaires, de toute façon ils ne me les paient pas, mais pour le moment, comme je m’ennuie, pourquoi pas, j’ai le temps, ensuite j’entrerai dans un programme strict. Si tu ne viens pas rapidement, tu me trouveras aigri, le temps passe si difficilement. Si tu étais maintenant à côté de moi, je t’embrasserais si fort, comme un ours et je ne sais pas ce qui arriverait à tes os. Je sens que mes muscles tremblent déjà, probablement qu’aujourd’hui je me suis trop reposé. Cela ne fait rien, cela aussi passera.
Ce soir, j’ai joué un peu avec l’enfant des patrons. Il est du même âge approximativement qu’Agnès et il est très gentil. Cela m’a donné une très grande envie de ma petite. En pensée, je lui ai fait tout un programme, je l’ai vu grandie, je lui ai appris à conduire et je lui ai même fait un petit frère. J’ai même réfléchi à quel nom lui donner puisque cette fois c’est mon tour, mais je n’ai pas pu me décider encore. Nous avons encore du temps, peut-être, nous verrons.
Cela vaut la peine de m’écrire que tu m’aimes, puisque moi je t’aime, mon amour, et quand je le lis, je m’en réjouis chaque fois comme d’une nouveauté, comme à la première déclaration, comme quelque chose d’inattendu.
Je t’embrasse, mon amour et à bientôt, bonne nuit et baisers de Sandou

Mon chéri

Dimanche, 7 ou 8 septembre 1963

Mon chéri,

J’ai reçu aujourd’hui tes lettres écrites juste il y a une semaine. J’espère qu’entre temps tu as reçu mes autres lettres et que bientôt je recevrai ta déclaration puisque depuis trois jours j’ai reçu ma Carte d’Identité et maintenant ne manque plus que ta déclaration pour Agnès pour que je puisse demander le passeport.

Je voulais aller demain à Nazareth mais je vais devoir le retarder puisque depuis hier il y a grève des autobus. Je pourrais aller en train à Haïfa et partir de là. J’irai cette semaine, d’une façon ou de l’autre. Pour le moment, seule.(1)

J’ai pensé moi aussi qu’il serait bien se promener ensemble, épaule contre épaule. Juste ça nous rendrait heureux.

Je suis assez paresseuse ces derniers jours et je passe le temps lisant un tas des livres policiers en anglais (je les obtiens plus facilement ceux-ci). Je sais que ce n’est pas bien et qu’il ne faudrait pas, je décide d’arrêter, puis je deviens tellement nerveuse que je prends une autre comme médicament – et temporairement au moins, il aide. Hier nous avons été à la piscine de Givatrambam avec Agnès et elle s’est distrait formidablement bien, elle et très courageuse et veut aussitôt imiter les grands essayant (20 – 30 fois) sauter (mais seulement serrant bien ma main). Elle s’est vite fait des copines là et elles ont joué avec le douche, (s’approchant et s’enfuyant).

Le soir j’étais avec Zsuzsi, Klàri et tous nos enfants au parc, Agnès dans la robe que je lui avais acheté (10 l) avant notre départ à Naharie et elle ressemblait à une papillon, et riait, courait, etc. toutes les deux mères ont envié et Zsuzsi disait « Kati était ainsi petite mais n’a jamais eu une telle robe ». Ce que bien sûr je ne crois pas. J’étais très contente d’elle, sauf qu’elle a appris à faire pipi comme les garçons (fait semblant le montrant seulement) mais pas souvent et cela lui passera. Le mot qu’elle répète le plus souvent ces derniers jours est « Cela », l’a-t-elle appris de moi ? Elle mange bien, de la soupe, de la viande, des œufs, tout qu’elle ne voulait pas jusqu’à maintenant.

De nouveau une vague de chaleur nous a envahi, Klàri disait que dans le journal c’était écrit 35 à 60 degrés pour Tel-Aviv. Mais je commence presque à m’y habituer et seulement le soir, quand l’humidité s’abat je souffre de cette chaleur suffocant.

Je pense beaucoup à nous ensemble et penser à toi me réchauffe le cœur. Que c’est bon de nous avoir ! Et que nous avons la petite. N’est-ce pas monsieur ? !

J’espère que tu sais que ton départ de ton poste actuelle n’empêchera avec rien notre rencontre, à partir de 25 octobre nous pourrions être ensemble, dans ce cas je fêterai la naissance d’Agnès avec les enfants d’ici avant notre départ. D’après ce que tu m’écris je ne crois pas que cela veut la peine que tu restes encore dans cette endroit, mais arrange-toi une autre travail à partir de là, ne pars pas définitivement de ce moulin jusqu’à ce que tu n’as pas fixé un autre où aller.

Je crois c’est une très bonne idée de faire paraître une annonce dans le journal de Meunerie, mais tu pourras en même temps répondre toi aussi aux offres de travail de ceux qui cherchent un Chef Meunier. Qu’étaient les résultats des deux réponses arrivés à Zurich ? De toute façon, entends-toi bien avec ceux de St. Didier pour qu’ils te donnent une bonne recommandation, même si pour le peu de temps que tu as travaillé pour eux. Cela signifie quelque chose, je crois. Voudrais-tu que j’en demande un de Roth ?

C’est 5 p.m. et Agnès vient se réveiller je finis rapidement tant qu’elle me laisse et nous irons à la poste aussitôt que je l’habille.

Je t’embrasse avec beaucoup, beaucoup d’amour mon cher garçon
Juli
(ou Judit comme t’aime mieux m’appeler)
et Agnès(crix crax)

5 septembre 1963

Mon chéri, c’est encore matin, je viens seulement de t’expédier la lettre express écrit il y a une heure et je t’écris de nouveau.

Je te dis en parenthèse que hier on m’a enlevé un dent de sagesse, le dernier, rapidement, j’étais plutôt affolée mais c’est bien passé, et avant-hier c’était hamsin me donnant l’impression que je ne peux lever un seul doigt.Je réfléchis ce qu’il nous faut pour le logement. Je ne sais pas si cela vaut la peine de prendre quoi que soit d’ici.Les choses les plus importantes :Y a-t-il des sources de chaleur dans le logement ?

Sur quoi préparerai-je à manger ?Sur quoi dormirons-nous ?

Peut-être je devrais prendre le lit d’Agnès mis en morceau ?Une table et trois chaises on peut acheter, il ne faut pas qu’ils soient neufs.

Une chaise haute pour qu’Agnès arrive jusqu’au table et tout va concernant le mobilier.J’ai oubliée la chapitre armoire. Oui, moi aussi je voudrais beaucoup une table et des petits chaises pour notre fillette. S’il y a de linoléum, il ne faut plus de tapis, n’est-ce pas ? Mais, si tu crois, je pourrais apporter avec moi les deux petits tapis de grand-mère. Ton opinion ?

En ce qui concerne les affaires d’Agnès la plupart ne sont plus utilisables et je ne suis pas préparée pour l’hiver, elle a juste une pantalon chaud blanc, la reste il faudra décider où c’est le mieux d’en acheter. Je vais m’intéresser combien cela coûte ici et écris-moi combien coûte un pull, une robe chaude là bas, etc.

Il ne te manque pas certaines choses ? As-tu acheté là ? Tu dois t’acheter absolument un pantalon d’hiver, peut être dans un grand magasin à Paris ? Où est-ce plus bonne marché près de toi ? Achète-toi de toute façon l’un bon, ne fais pas d’économies dessus, l’extérieur compte quand tu veux te présenter, aller quelque part. Achète-toi aussi, si possible, un petit radio, il se passera encore un mois et demi jusqu’à notre rencontre et il te tiendra compagnie. Et sache qu’en écoutant radio France cela t’aidera à apprendre la langue, à t’y habituer, c’est donc une bonne investissement de toute façon et comme nous ne savons quand nous nous établirons quelque part et en attendant que papa nous achète un grand radio promis, un petit sera fort bienvenu.

Agnès adore la musique, elle aussi. Si tu as besoin d’argent, prend de ce qui reste de grand-mère, sauf ce qu'il faut encore pour mon voyage. Si tu veux que je t’achète quelque chose d’ici écris-moi, c’est possible que certains affaires sont moins chers ici. Par exemple chemise en nylon, j’en sais rien en fait.

Avec quoi chauffe-t-on là ? Bois ? Charbon ? Est-ce qu’on va en pantalon l’hiver ou non ? J’ai beaucoup de choses et aussi un pantalon noir chaud feutré. Dois-je prendre aussi les vêtements d’été ? Je dois prendre les oreillers et draps de toute façon, n’est-ce pas ?

Si je vais avec le bateau il ne vaut pas la peine de envoyer je ne crois pas que cela coûtera moins et si je les prends avec moi ils arriveront en même temps que moi et pas plus tard. Où devrais-je les envoyer maintenant pour qu’ils arrivent dans environ un mois. As-tu besoin que je t’envoie un édredon ? Ou ils t’ont emprunté une couverture ? N’oublie pas qu’en octobre, il sera déjà bien froid là-bas.Je dois n’est-ce pas prendre avec moi les casseroles etLes assiettes, de toute façon on en a peu, je les prends et nous les complèterons là au besoin ?

Brosse, veder, etc. je crois coûtera (combien ?) si on doit les racheter.

Vaut-il la peine de prendre la chaise long ?Les couvertures, Irène me les ai rendu, je les prends ou veux-tu que je te les envoie ? Combien ?Combien coûte une machine à repasser moderne avec vapeur en France ? Ou je prend le vieille à grand-mère ? Que faire du mixer ? Je crois qu’on devra le prendre.

Probablement dans un petit village comme cela il n’y a pas de lavoir pour le linge. Devrions-nous prendre la machine à laver ? (au moins pour les draps) combien coûte une neuve là ? devrais-je vendre celui-ci ?

Devrai-je essayer à louer cette appartement à partir du premier novembre ? Si oui, je devrais faire paraître des annonces bientôt. Pour combien de temps louer ?Que ferons-nous du frigidaire ?Y a-t-il une crèche ou maternelle dans le village ou une ville près ? J’espère qu’après notre arrivé nous allons pouvoir acheter une vieille voiture (nous ou papa) alors il n’y aura pas de problème à emmener et ramener la fillette.

Je voudrais beaucoup utiliser la prochaine année scolaire pour obtenir la diplôme, et si possible travailler. Cela aidera aussi pour l’examen. Il y a sûrement un cours par correspondance là-bas aussi et je ne crois pas qu’il n’y aura pas de possibilité à terminer mes études. Il sera temps. Que crois-tu ? Peut-être tu pourrais obtenir d’un annuaire téléphonique l’adresse de l’Institut par correspondance et leur écrire en demandant un prospectus, même en décrivant la situation et leur demandant conseil ou les possibilités et en spécifiant que je serais prêt au besoin de payer une année en plus ou ce qu’ils demanderont.

Ta tête tourne n’est-ce pas ?

Je t’ai envahis avec une avalanche des questions et choses à faire, à apprendre. Mais tu m’as demandée je te décrire en détail ce que je veux prendre avec moi.Je n’ai pas oublié une seconde la problème d’Agnès et elle sera baptisé avant notre départ comme tu me l’avais demandé.

Assez des choses sérieux, allons à celles, importantes!

Aucun mot écrit même pas milles mots ne peuvent exprimer mon désir de toi. Quelque chose qui croit et croit et devient de plus en plus dominant sur tout le reste. (Ceci ne sonne pas très bien en roumain, pourquoi t’est-tu marié avec une hongroise ? Tu l’as voulu ! )

J’espère que mes lettres diminuent un peu ta solitude, j’ai Agnès près de moi et je ne peux pas me considérer seule et je ne la suis pas. En plus, il y a tous autour et Irène. Mais encore un peu et nous serons ensemble mon cher garçon aimé, n’est-ce pas ? ! ?

Ensemble nous pourrons lutter mieux pour tout ce que nous voulons faire. Même si ensemble quelquefois il paraît que ce n’est pas bien, séparés c’est de cent fois pire. Au moins pour apprendre cela, disons que c’est bien d’être séparés l’un de l’autre. Essayons ainsi à chercher dans tout mauvais quelque chose de bon… Bien ?

Je t’envoie des baisers, baisers, beaucoup beaucoup avec énorme désir
Julie

Début septembre 1953

Lettre de Sandou à Julie


St. Didier (AIN) France le 2 septembre 1963

Ma chérie,

C’est dimanche après-midi. Hier j’ai reçu ta lettre de jeudi - moi aussi je suis dans le même état sentimental que toi et je pourrais envoyer au diable toute la France et tout laisser tomber, pour être ensemble plus rapidement.

Ce matin, je me suis senti comme “avant les règles" et tu as eu de la chance que je sois seul. Je pense avec chaleur à vous deux et je n’hésiterais pas une minute à revenir, s’il n'y avait pas ces foutues illusions que je me fais.

Dès que notre fille se sentira de nouveau bien, va la promener chez tes tantes, cela sera une détente pour toi et pour elle aussi. Je ne sais pas quoi te conseiller d’autre, comme je ne sais pas quoi me conseiller à moi-même. Je ne fais rien d’autre que travailler, je le fais avec conscience et application. Je n’ai pas encore lavé mes affaires, qui traînent partout.

Avec les patrons d’ici, j’ai l’impression que pas grand-chose va en sortir. Pour le moment, ils ne m’ont pas encore établi le contrat, ni les papiers pour le permis de travail, on aurait eu besoin pour cela d’une photo, mais ils ne me l’ont pas demandée. Je me rends compte, que je devrais chercher autre chose, mais je ne sais pas ce qui me retient. C’est maintenant qu’il faudrait que je le fasse, tant que je travaille encore ici, et que l’attente ne me coûte encore que mon temps. S'il faut changer, au moins ne pas perdre trop de temps au même endroit. Le premier septembre est arrivé et s’est envolé, et à part les 300 francs d’acompte que j’ai reçus quand je suis allé voir ton père - rien. J’attendais qu’ils m’appellent hier, pour régler les comptes mais, rien, la semaine prochaine c’est moi qui devrai leur rappeler. Le pire est que je ne suis pas encore assez bien sur mes pieds, pour ‘rassembler mes jouets et ficher le camp d’ici’. J’essaierai.

Chère épouse, enfant adoré !

Il est 10 h du soir et je suis de nouveau dans ma chambre et avec toi. J’ai lu trois fois toutes tes lettres, j’ai pensé à elles et j’ai vu surtout ton impatience. Tu as raison au sujet de la persévérance et du courage, mais je considère que d’abord je dois arranger ma situation ici et seulement après faire des projets pour le futur. Il n’y a rien de changé, mais je crois qu’il faudra qu’on soit d’abord ensemble, nous ferons ensuite nos autres plans futurs. Ces derniers jours ont été pleins de pensées confuses, mais ils commencent à s’illuminer. Dommage que nous ne puissions faire un pas aussi grand que nous voudrions toute suite. Il y a besoin d’un peu de patience aussi.

Aujourd’hui, j’ai été enfin invité à la mairie pour les papiers : le permis de travail et de séjour, mais comme le secrétaire n’était pas là, j’irai demain de nouveau. Quand j’aurai ces papiers, la prolongation de mon séjour en France se réglera aussi, et alors vous pourrez venir, vous aussi.
Ce n’est pas la peine de te faire des soucis pour le chauffage, le mobilier, etc. tout va se résoudre avec le temps. J’espère que jusqu’à ce que vous arriviez, dans la maison où l’on habitera à côté du moulin il y aura de l’eau courante et aussi de l’électricité.

Tu as eu raison de m’écrire en détail, je vais ainsi penser à tout et résoudre les problèmes, l’un après l'autre. En général cela vaut la peine d’acheter les choses là-bas, sauf les produits industriels qui sont moins chers ici.
(...)
Ton mari qui t’aime fort, Sandou



Saint Didier le 3 septembre 63

Ma fillette,

Ce matin j’ai relu pour la troisième fois la lettre que tu m’as écrite. Tu es gentille, ma chère fillette, avec tes pensées et tes envies. On terminera ce divorce forcé, et espérons que quelque chose nous restera de ça, et, quand nous serons de nouveau ensemble, nous nous entendrons mieux qu’avant. À moi aussi, le temps jusqu’à notre rencontre paraît sans fin. Je crois que quel que soit le métier que nous ferons en France, ce sera quand même mieux ensemble que seul et le coût est à peu près le même, dans les deux endroits.

À propos de ce que t’a écrit Deborah , laissons le temps nous montrer ce qu’il y a de mieux, ce que ton père fera - l’un de nous a du mal comprendre le vieux. Je voudrais que ce soit moi et pas sa femme.

Il y a ici un enfant de deux ans qui me sourit de temps en temps et me rappelle notre fillette. Même si ce ne sont que deux mois depuis que je suis parti, je crois qu’elle a encore grandi. Moi aussi je lis quelquefois mal tes lettres et je me fais du mauvais sang et dans la photo que tu as envoyée, tu as des seins qui hantent mon sommeil, j’ai envie de les manger. En attendant, je t’embrasse et je mords ta peau pleine de taches de rousseur.

Je te laisse ma fille aimée, bonne nuit, je n’ai plus envie de me séparer de toi-même en écriture.

Tout l’amour pour ma chère fillette,
votre Sandou

Julie à Sandou
Cher Sandou,

J’étais à la mairie et dans une semaine je reçois la Carte d’Identité et je pourrais demander alors le Passeport, mais c’est possible seulement si tu donnes ton accord devant le Consul Israélien de Paris ou Genève, pour que je puisse porter l’enfant avec moi. Écris que toi, avec carte d’identité et passeport N°, donne le droit à ta femme JC de prendre avec elle à l’étranger, Agnès Katrin C, née à Jérusalem, le 26 octobre 1961. Essaie le résoudre aussi vite que possible et envoie-le moi express recommandé.

Je n’ai pas reçu ta lettre au sujet de la bague, j’étais un peu étonné moi aussi que tu ne m’avais rien écrit de mon anniversaire, probablement c’est perdue. Je ne comprends pas comment juste celle-ci ? De toute façon je reprendrai tes lettres, relirai, peut-être retrouverais. J’ai donné l’examen hier et tombée, je le repasse le 16 la deuxième fois. J’ai fait trop près le retour à l’arrière pour me parquer à la fin, sinon il aura dû me laisser passer. Le chauffeur qui m’apprend à conduire dit lui aussi que ça va assez bien et il était sur que je passerai. Je regret surtout l’argent.

Je ne t’écris davantage aujourd’hui, je sis dans une papeterie et je veux t’expédier ceci d’urgence, puis rentrer et m’occuper de ménage et repas. Je t’écrirai plus ce soir. J’ai reçu une lettre de Stelian et une de ta maman, je te les enverrai, elles ne sont pas avec moi.

Je t’embrasse avec beaucoup d’amour,
Judit



5 septembre 1963

Mon chéri,

Ce n’est pas facile de t’écrire comme je ne sais pas quoi je veux t’écrire. Mon premier impulse après que tu m’as écrit que je peux venir était que je suis allée faisant tout pour qu’on puisse se voir rapidement. Ensuite j’ai reçu une autre lettre, dans laquelle tu écris que bien que tu as eu l’idée à chercher un meilleur lieu (pendant que tu travailles là, cherchant tu n’as rien à perdre, seulement l’argent des lettres et si ce n’est pas possible d’y aller samedi, un jour de travail) mais tu écris que tu n’as pas le courage (pourquoi ?) ni la disposition (quand on cherche quelque chose nouveau dans la vie et il s’agit de toute la famille, je ne crois pas que tu devrais te conduire selon l’humeur du moment, surtout comme tu n’es pas tout à fait satisfait où tu es) et, ajoute-tu, te manque la persévérance. (Si nous n’aurons pas de persévérance, tu restera pour toujours à travailler là, comme tu as resté chez Roth, le premier moulin t’offrant vite vite à te prendre.)

Je crois qu’outre que conduire une correspondance t’as rien à perdre, au contraire, je ne vois pas après que tu termines tes trois mois (ou six) là-bas, à Saint Didier, pourquoi ne pas t’assurer en continuation quelque chose de mieux. En plus la différence de salaire pourrait compenser les heures non travaillées à cause de déplacement ou déménagement. Je ne sais pas comment nous pourrons meubler un logement tout en sachant que nous resterons peu de temps mais je crois qu’on peut résoudre cela. En plus, au moins jusqu’à ce que tu ne saches pas si tu recevrai une prolongation de trois mois, il n’est pas rationnel d’y aller.

Le plus sérieux point est l’enfant. Elle se sent bien extrêmement bien à l’école maternelle et même Irène l’a observé, elle est tout à fait changée depuis les quelques jours qu’elle y va de nouveau, en bien. Elle est plus gaie, rit davantage, parle énormément. Elle se lève entre six et demi et sept et demi, y va de huit à midi et demi, dort presque trois heures l’après-midi et le soir, oui, c’est vrai, se couche après huit ou huit et demi. Probablement à cause du temps, c’est un peu mieux enfin, au moins le soir et à l’aube c’est un peu plus frais. Elle a bon appétit, mange beaucoup même de viande et ce matin c’est réveillé me disant : « je veux œuf » - je lui ai fait, mou, elle a mangé presque tout. Elle est tellement mignonne!

Tout cela étant dites, rational et avec la tête, je veux te dire que je m’envolerai chez toi aussi vite que les papiers me permettront, j’ai tant désir de toi chaque jour que j’ai l’impression à ne plus supporter,

Je t’embrasse, avec désir et amour,
au revoir aussi vite que possible,
Judit
Je crois qu'il il a et il y eu des dizaines de milliers des hommes et des femmes en échangeant des lettres similaires et réfléchissant sur leur futur le coeur lourd de la séparation momentannée, d'où, j'ai l'impression viennent l'importance de ces lettres détaillées. J'ai ajouté ici plusieurs pour donner un peu le goût de l'échange, et non seulement celles que j'avais écrite, moi.

Et aussi à la place de hier, quand je n'ai pas pu en mettre aucune.

Des vacances trop courtes

22 août 1963 Naharia

Mon amour, et voilà la première journée de Naharia est passée. Enfin j’ai réussi à coucher Agnès et je sors furtivement de la chambre pour qu’elle ne se réveille pas, pour venir ici, vis-à-vis d’où nous habitons et la pension où nous mangeons et je t’écris. Je t’écris à Saint Didier puisque je ne sais pas si la lettre arrivera jusqu’à dimanche à Zürich et, d’après ce que j’ai compris de ta dernière lettre, vous vous êtes décidés encore avant la fin du mois d’épreuve que tu restes au moins encore trois mois là, au moins s’ils réussissent à t’obtenir le droit au travail.

Aujourd’hui nous nous sommes levées à 5 Agnès l’a décidé ainsi, j’espère qu’elle dormira plus tard cette nuit puisque nous avons toutes les deux besoin de sommeil. La voiture est venu nous prendre exactement à 7 heures 30 et à 8 nous étions déjà en train et tes lettres expédiées.

Notre petite fille a été très sage surtout puisque je lui ai acheté un nouveau livre et le lui racontais. Elle était intéressée, par le paysage moins. Dans une heure la rapide est arrivé à Haïfa et ensuite encore une heure jusqu’ici avec le personnel. La mer est très belle.

Ensuite nous avons pris le moyen de locomotion d’ici, fiacre avec cheval, comme dans les anciens temps (cent ou cinquante à Bucarest, jusqu’à 1948 à Cluj) et « Madame » avec sa fillette (et aussi d’autres puisque ici il est commune), nous sommes arrivés jusqu’à la pension recommandé. Il coûte 6 lires la chambre, moi et Agnès dans une minuscule pièce, fraîche mais sans aucun confort. Vis-à-vis sont la douche et les toilettes et pour Agnès j’ai apporté le pot. La poussette aussi, nous sommes en sept à huit minutes à la mer.

En face d’où nous dormons, on peut manger avec environ 8 lires par jour, ainsi le tout ne coûte pas trop. Agnès a mangé mieux que n’importe quand, à midi beaucoup de viande, après-midi un entier gâteau genre tort au chocolat, bu du lait, le soir du charcuterie avec des carottes. Et énormément du « mitz escaliot » (jus de pamplemousse), j’ai bu moi aussi aujourd’hui presque deux litres. Nous avons dormi l’après-midi de deux heures et demie à quatre et demi puis nous sommes allées à la plage. Il coûte 0,55 l’entré et c’est la plus belle plage que j’ai jamais vu.

Non seulement la sable fin, la plage étendue, l’eau peu profond au début et défendu des grandes vagues par le digue éloigné, mais en plus il y a un basin de 100 sur 50 mètres avec l’eau salé propre comme le cristal et refroidi à température constant. Pour les enfants, une autre place entourée pour seulement ceux sous 7 ans avec deux piscines différents. C’est très agréable.

À peine j’ai réussi la décider à rentrer par contre. J’ai nagé moi aussi 400 m (entre temps Agnès était avec une autre maman). Revenant, j’ai fait connaissance avec quelques-uns1 habitant ici ensuite j’ai mangé puis je me suis embêtée pendant une heure et demie pour que la fillette s’endorme, bien qu’elle était mort de fatigue.

Bonne nuit mon amour, je vais moi aussi me coucher. Ecris-moi : était-tu malade sur le bateau, comment était le repas, le lit et tu ne m’as rien écrit détaillé non plus d’où tu es.

Encore une fois, bonne nuit, et je t’embrasse fort
Juli

29 août 63 jeudi
Cher Sandou et papa,
Tu nous manques à toutes les deux, nous te désirons énormément. Agnès aussi se souvient de plus en plus souvent disant tes deux noms. Quand je lui demande : où est papa ? Elle répond : au moulin. Que fait-il là ? Elle dit : pain. Elle n’a plus d’amygdalite mais elle est amaigrie et blanche.
Dans une seule journée, la première que je l’ai laissé dehors, elle a déjà récupéré presque tout sa couleur. Je crois qu’enfin au début de la semaine je pourrais passer l’examen de conduit.
Autrement rien. Sauf que je n’arrive plus dormir les nuits de désir de toi. J’ai sommeil et je suis fatiguée je m’endors difficilement. Combien de temps passera encore jusqu’à tu sois près de moi au lit ? Jusqu’à je pourrais te serrer et me blottir contre toi ?
Mes nerf vont aussi un peu pire, surtout que mes dents ne m’ont pas laissé non plus en paix, probablement je serai obligé d’enlever le dernière dent de sagesse. Je ne suis pas enchantée, bien sûr. Encore deux à trois jours et Agnès ira à la maternelle. Alors, je m’occuperai de tout. Hier j’ai déplacé de nouveau tous les meubles j’aime mieux ainsi (pour le moment) et c’est plus facile à nettoyer.
Je t’embrasse avec amour, plusieurs fois, Juli

1er septembre 1963
Mon chéri,
Je ne t’avais pas écrit depuis quelques jours attendant et attendant encore à recevoir quelque chose. Tu m’as gâté trop m’écrivant journellement ensuite, depuis le 19 août à 28, neuf journées, rien. Je me suis déjà imaginé pleines de choses et surtout qu’il a arrivé quelque chose à papa comme je savais que tu y vas. Enfin, bien que tout est en ordre, tant chez lui que chez toi.
Comme j’avais écrit dans ma lettre ne t’arrivant, hélas, qu’après ton retour, je t’avais prévenu à ne pas attendre trop de la visite. Curieux, dans la lettre de Deborah que je viens de recevoir, elle décrit un peu autrement l’attitude de papa. Je te l’envoi à la lire.
Mon amour, j’ai bien compris ce que t’as écrit, puis-je venir déjà aussitôt que j’ai les papiers ? Si oui, j’essaierai les recevoir plus rapidement, depuis deux mois et j’ai rien reçu encore. De toute façon, si tu m’envoie une invitation légalisée par la police de là-bas cela m’aidera. Mais je crois ne pas en avoir besoin.
Tu n’as pas compris pourquoi j’ai interrompu le congé ? Subitement Agnès avait 39,3°, juste pour un jour, le lendemain 38,5 puis sans fièvre. De nouveau ses amygdales, mais j’ai dû les traiter à la maison et maintenant l’école maternelle a recommencé. De 8 à 1230 puis je l’ai ramenée à la maison, elle a mangé puis elle dort aussitôt.
À peine j’ai fermé sa porte et j’ai pris le crayon dans le main pour t’écrire. Ta lettre est arrivée seulement à 12 30 et je l’ai lu pendant qu’elle mangeait sans m’arrêter un second. J’étais déjà de mauvaise humeur et nerveuse, mais maintenant que m’as écrit de nouveau, tout va bien et en ordre, mon amour.Demain je passe l’examen à une heure, nous verrons ce qui sera. J’ai un peu d’émotions, c’est naturelle d’avoir du trac, n’est-ce pas ?
Es-tu sûr d’obtenir le Permis de Travail ? De toute façon sinon là, ailleurs, tu l’auras, n’est-ce pas? J’ai envoyé une longue lettre à Gabrielle, as-tu écrit à Fanny? Sais-tu quelque chose de lui ? Nous allons boire le champagne, au lieu de ton anniversaire et au lieu de celui de Zurich, à notre rencontre, même si on s’enivre, mais seulement une fois qu’on est sûr qu’Agnès dort ou quelqu’un est avec elle. Bien?
Il fait si chaud que j’ai commencé à boire de la bière noire et sucré sans alcool mais plus rafraîchissant que tout autre boisson. Agnès l’aime aussi, crois-moi.
Je viens relire encore une fois tes lettres et j’ai eu subitement une telle envie de toi que tu ne peux même pas l’imaginer. Et ce que je n’aurais pas pu imaginer jamais, tes lignes lus par moi ont provoqué en moi un désir urgent et corporel, si tu serais ici tu ne devrais attendre un seul second.Mon chéri, j’essaierai résoudre tout, inclusif Nazareth , aussi vite que possible, je ne suis pas exactement combien de temps cela durera. J’ai économisé de l’argent, moi aussi, même si pas trop, quand même.
Je t’embrasse avec amour et écris-moi aussi souvent qu’avant et je te répondrai de même et on se sentira tous les deux plus près l’un de l’autre,Je t’aime mon cher mari,
Judit