8 mai 02
Hier j’ai rencontré François, après des mois.
Il a fort mauvaise mine, loin de son mine rayonnant lors notre entrevue de séparation. Il a été poli, davantage que je me souvenais : il m’a tenu la porte pour sortir des Impôts.
Il m’a demandé :
— Quand va-t-on devant le juge ?
Il lui semblait que ça va trop lentement.
— Ils sont surchargés, j’ai répondu.
— Quand la demande a été déposée ? A-t-il été déposé ?
Je me suis dit : comment il ne s’en souvient pas, ne le sait pas? mais j’ai seulement répondu.
— Le trois.
— Quoi ? Trois mai ? Seulement?
— Non, le trois avril.
— Ah, bon.
L’air de chien battu et malade.
Le soir, j’ai parlé avec Stéphanie qui arrive demain à Paris pour fixer le lieu et l’heure de notre rencontre. On lui a mis des tuiles dans la cour, mais pastel à la place des couleurs vives qu’elle aurait voulu. «Je ne vois pas les couleurs, sauf aussitôt après la pluie. Mais on me dit, c’est beau.»
En parlant de ce livre et que je ferais, j’ai changé le nom, mais. «Ne t’en fais pas, d’ici là…». Finis, puis mets-le sur l’étagère. Ferme le chapitre et continue ton chemin.
Son observation m’a fort secoué, heureusement, toutes ses prédictions ne s’avèrent pas justes. Elle est convaincue que la femme, une fois mariée, va aussitôt le quitter et aller en Afrique et qu’il a cette mine en sachant déjà qu’elle le quittera.
Je veux ce livre publié. Sa bonne fin ne sera pas happy end entre nous, même pas le happy divorce prononcé et signé par le juge, mais la publication de ce livre ou d’un autre livre écrit par moi. Alors, le cercle sera fermé.
Je veux le voir publié, mais je ne souhaite pas avant qu’il meurt. Il n’est plus 'Lui', j’ai déjà fait son deuil, le deuil de 'mon amour pour toujours', le deuil de celui qui était 'destiné dans cette vie'. Celui qui était hier devant moi, c’était un autre. Je ne lui souhaite rien de terrible. Juste l’éloignement de moi.
Avant diner, madame Filipetto m’a rendu visite et a raconté de son amie qui venait le visiter.
« Son mari l’insulte tout le temps. »
Je pensais : moi, personne ne m’embête plus.
« Il doit avoir toujours raison. Il est agressif. Il faut rien lui dire, pas lui répondre. »
Je songeais : je connais, connaissais la chanson.
« Il est allongé sur le lit, malade et méchant contre sa femme. »
Il n’était pas le seul.
« Vous, personne ne vous embête ici, au fond de la cour. »
Ah oui ! Et enfin, il fait beau dehors, aussi. Hier j’ai dîné devant la maison, dans la cour. Mes voisins sont discrets, on les entend rarement. Je les entendrais plus pour quelque mois, puisque l’été les fenêtres sont ouvertes et, dans le jardin, nos 'salons de dehors' ne sont séparés que par un haïe.
J’étais même gênée, puisque Mme Filipetto n’entend pas bien et parle très fort, ma voisine lisait au pas de sa porte tranquillement et son mari lui parla plus tard d’une voix basse. J’étais obligée d’élever ma voix de temps en temps "Quoi ? Que dites-vous ?" demandait mme Filipetto sinon. Hier, toute sa distraction pour la journée était les quelques paroles échangées avec moi.
Elle s’ennuie à mourir.
Depuis quelque temps, j’hésite d’aller chez elle, ça sent terrible. Je préfère la 'recevoir' dans le jardin. Quand c’est possible, après que mes voisins sont partis, pour les déranger moins, mais depuis Pâques, il est au chômage et sort rarement.
Heureusement, madame Filipetto n’a pas voulu du radio que je lui avais acheté «Trop compliqué pour moi !». Ce matin, j’ai découvert comment changer les postes, en fait il cherche lui-même. Je me délecte de silence, mais je voulais écouter ce qu’on dise du nouveau gouvernement. J’écoute la musique aussi de temps en temps. Quand elle ne me plait pas, je change de longueur d’onde. Ce n’est pas comme mon futur ex qui parlait sans cesse sur une seule piste, impossible le switcher, zapper.
Personne ne m’insulte plus, au moins chez moi. J’ai toujours raison ici et je vis à ma guise. Mes petits-enfants pas loin, me réchauffent le cœur, lundi je les ai couchés.
Il fait beau. La maison, ses pièces sont accueillantes. J’ai plein de bonnes choses dans le frigo et le congélateur. Depuis ce matin, même une musique d’ambiance. Je ne le laisserai pas marcher toute la journée, mais pour le moment elle me fait plaisir.
Pas longtemps. Ils viennent de répéter pour la troisième fois depuis une heure, les deux attentats de hier. Une fois, c’était intéressant à savoir, l’entendre la 3e fois est embêtante. Trop.
Bon, je change de poste, trouve quelque chose reposant ou je ferme. Les femmes ministres et pas de 'jupettes' : une femme ministre de l’armée! Ils parlent des ministres, mais ils ne donnent parole qu’aux socialistes qui les critiquent, pourquoi pas aussi aux autres? Ou alors aux ministres pour qu’ils parlent de leurs intentions. Existe-t-il un poste positif, optimiste, agréable à écouter? Aurais-je la patience de chercher? Finalement, j’ai l’impression qu’ils ont bien choisi : un philosophe enseignant à L’éducation ; une femme à l’Armée ; un diplomate à Externe, Sarkozi à l’Intérieur, un grand patron au Finances, et ainsi de suite.
« Morceaux de chair humaine projetés loin. » Ouf ! Ouf ! Je veux bien des détails, mais pas ça! Pas ça! Ils le disent des Français, mais ils passent rapidement sur l’attentat sur des Israéliens. Torpiller la paix, hélas. Comment faire la paix? Maintenant ils parlent des catastrophes aériennes. Je viens d’acheter mon billet. En août, j’irai à Washington. J’espère, j’espère qu’il se passera bien.
Le problème est que depuis ma cheville heurte, je crains d'aller loin.
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