Je viens de me réveiller ce matin, il est quatre heures. J’ai rêvé d’être dans un lieu magique.
Je sais d’un coup pourquoi mon estomac s’était révolté avant-hier et encore hier j’ai eu des nausées: quelque part à l’intérieur, j’ai mal supporté lire à haut voix le passage sur le logement de Montmartre. Même en écrivant, maintenant, une salive amère envahit ma bouche. Ce n’est pas dû à quelque aliment avarié que j’aurais mangé comme je croyais, faute d’avoir trouvé pourquoi je n’arrivais plus à continuer mon travail de correction.
Oui, je tenais à cet appartement, je l’ai aimé. Plus que François? Probablement. Plus que ce qu’il est devenu, nettement plus. Évoquer revivre les heurts qu’il m’a causés n’était pas agréable non plus, mais le deuil du logement qui a révolté mon ventre.
Contempler les photos récentes de moi, ne m’a pas enchanté non plus. Qu’a–t–il réussi à faire de moi en dix ans!?
Non. Non! C’est moi qui est devenue ainsi.
Je ne suis plus belle, attirante, que dans les yeux et la présence de mes petits-enfants. Leurs visages s’illuminent dès qu’ils m’aperçoivent. En leur présence, avec eux dans mes bras, mon visage change aussi, s’adoucit, rayonne. Je retrouve dans le miroir de l’ascenseur que nous regardons ensemble, David et moi, Gaby et moi, quelqu’un d’agréable et que je ne réfute pas.
Regard encore une fois, disais-je à David, pensant qu’il s’admirera dans le miroir et ne s’approchera ainsi pas de la porte.
-Ma !Ma ! il m’a aperçu dans la glace.
-Non, dis-je, me rendant compte. Mamie.
-Mamie ! montra-t-il alors heureux avec ses doigts, heureux de ce qu’il voyait.
Je me regarde rarement en miroir, mais les photos, hélas, ne mentent pas.
Qu’est-je devenue? Pourrais-je m’y échapper?
«Beaucoup mieux qu’il y a un an», disait Stéphanie. «Nettement plus jeune qu’à votre arrivé», dit ma voisine. Possible. Pas encore assez.
Il faut finir ce journal, ce divorce, le livre de ce deuil de ce qui était et me lancer dans… ce qui est au-delà de brouillard. Pas la rencontre éventuelle avec Bruce ou Pierre, fantômes de passé, se rappelant la Julie ancienne, celle de 33 ou de 45 ans. L’avenir réside ailleurs.
Même ce logement ne m’enchante plus autant. Cela reviendra! Pour le moment, depuis qu’on a vandalisé ma nouvelle voiture, parqué devant la maison presque, je me sens violée en quelque chose, déstabilisée. Je gare ma voiture dans la cour, mais ceci n’a rien résolu de mes sentiments. Je parcours ma chambre avec plaisir, mais un peu de délectation profond manque. Je dois retrouver mes joies !
Retrouver mon plaisir. Retrouver des buts. Retrouver, trouver des gens avec qui interagir. Il y a les petits, Analyse et Lionel. Peut-être le stage d’écriture théâtrale de la semaine prochaine me fera du bien. Être entre d’autres, ayant les mêmes intérêts. De tout de façon, c’est un pas hors du brouillard, à travers le brouillard vers l’avenir.
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