24 mars 1957

J'ai une meilleure mine. Enfin, je suis contente de mon aspect. J'espère que cela durera, non seulement aujourd’hui quand il n'y a personne pour l'apprécier, mais longtemps encore. Mes cheveux sont plus longs et ils tombent très bien. Mon teint est d’un joli brun, car j’ai réussi bronzer au lieu de brûler, mes lèvres un peu fardées, mon visage est régulier pour une fois sans taches de rousseur. J'ai bonne mine. Mon nouveau costume trois pièces et ma blouse de soie naturelle me donnent une allure élégante.

C'est maintenant que je devrais rencontrer mon futur mari. Je suis enfin telle que je voudrais que soit la fille qui lui plaise. Je dois absolument le trouver !

Je dois sortir beaucoup plus. Par exemple au lieu de me coucher je voudrais revoir Sandou. Suis-je devenue plus sérieuse ? En quelques jours ?

Hier j'ai ressenti pour la première fois que je ne suis plus si jeune. J'ai aperçu dans la rue deux filles de 16 - 17 ans, elles étaient fraîches et belles. Pour la première fois de ma vie, je me suis rendu compte que moi j'ai déjà vingt-trois ans.

Le soir:
Si belle que tu sois, quand tu es à côté d'une fille plus coquette, plus fringante, tu pâlis. Ça me fait mal, juste un peu. Je n'ai pas été jalouse. Moi aussi j'admire Édith. Donc je comprends qu'elle plaise plus à Eugène que moi. Mais je vais dorénavant la laisser se débrouiller toute seule, je ne vais plus l'inviter, l’aider ou la conseiller. C'est curieux que les garçons ressemblent tellement aux filles, Eugène courait après Édith, mais pourtant, il a tout fait pour faire comprendre à Bandi qu’il vient souvent me voir et qu'il est très bien avec moi.

Je ne pourrais être fâchée que si ça ne m'était jamais arrivé, de vouloir conquérir un deuxième ou un troisième garçon, bien qu'un autre m'intéresse. Je ne prétends pas qu'il ne puisse sortir avec d’autres filles que moi. Mais seulement tant que je ne tomberai pas sérieusement amoureuse, puisque alors...

Ai-je jamais été amoureuse, sérieusement ?

Je ne le crois pas.

Moïse m’avait plu au lycée et j’avais aussi été attirée par un de mes profs à l’école d’antibiotiques, mais seulement de loin pour tous les deux, sans les connaître réellement, ni l’un ni l’autre. Je n'ai rien eu d'autre de plus sérieux. Eugène, c'est juste un jeu, en attendant l’Autre. Cela aurait pu devenir très sérieux, mais entre temps j’ai découvert comment il était vraiment. Chez moi, jusqu’à maintenant, c’est ma raison qui a gouverné. Mais le temps doit arriver où mon cœur dictera. Je l'attends, ce temps-là !




Sans savoir, je l'avais déjà rencontré...

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