La nuit de désespoire

A partir de l'automne 1965 jusqu'au l'automne 1968, il y a trois ans et beacoup des mois, des jours, et même si on prend seulement à partir de déclaration "il n'y a pas de contrat d'amour" beaucoup de choses se sont passées dans ma vie.

J'ai eu des joies. Chaque jour, mes enfants ont fait quelque chose qui m'a enchanté et m'a rempli ma coeur de bonheur. Ma fille avait l'âge enchanteur de 4 à 7, elle été sage, mignonne et gentille à craquer. Mon fils était un bébé grandissant vite et découvrant tout autour de lui, bien dans sa peau et très intrepride.

Au travail, le propriétaire a bâti une imeuble tout neuve, le chef de ce chantier, Pierre, travaillant énormément avec ses maçons pour le finir. Une fois fini, nous avons eu une nouvelle laboratoire et des nouvelles laborantines. J'ai enseigné une à une à chaqu'une comment travailler et le baba de la chimie, ce qu'elle devait absolument savoir. J'ai introduit des nouvelles analyses et écrit l'utilisation de ceux utilisés. J'étais contante et la direction aussi de mon travail.

Ainsi, tout n'était pas noir au fond du gouffre, j'étais pas toujours triste, même si je me méfiais de plus en plus de mon mari et il s'éloignait chaque jour davantage de moi.
Puis, un jour...

Après que les enfants se sont endormis, j'ai eu envie d'aller au cinéma.
— Non, je dois aller au moulin, je suis de service cette nuit, me dit Sandou.
Mais il prend une douche, met une chemise blanche propre. 15 minutes après son départ je me décide à aller au cinéma même seule.

Je vais au moulin demander les clés de notre voiture.
— Où est mon mari ?
— Il n'est pas resté, il est seulement passé, aujourd'hui c'est moi qui suis de service, me répond un meunier.
Le grand portail du Moulin devant notre jardin était fermé.
— La clé ?
— Je ne l'ai pas, je travaille jusqu'à demain matin.
Que faire ?
J'ai écrit cette partie en 3e personne, pour l'éloigner de moi, il faisait trop mal autrement.

La nuit était tombée, une nuit sombre, sans étoiles. Même la lune était presque invisible. Julie contempla l’énorme portail fermant la cour du moulin, la cour où elle habitait. Elle n’avait pas de clé, l’ouvrier de service non plus, les patrons du moulin habitant aussi dans la cour étaient sortis. Personne à lui ouvrir.

La petite ville de nord était enveloppée comme d’habitude en brouillard et ce soir d’été lourd, une affreuse odeur des restes des jus de sucre pourris (éluats) envahissait les rues. De temps en temps, une rafale de vent tiède envoya ailleurs l’odeur putride et alors on respira pour quelques minutes l’air frais et humide du canal proche. On se sentait vivre de nouveau.

Les habitants comprenaient bien l’angoisse de fils du roi enfermé dans le Tour de Nesle, dont la ville était fière puisqu'il attestait son origine lointaine, ils comprenaient encore mieux son plaisir de s’en échapper, même si ce n’était que pour une courte période qu’il y réussit, avant d’être pris de nouveau dans le filet.

Il fallait sortir.

Elle ne pouvait pas admettre, supporter à être enfermé là. Jusque ce soir, cette petite maison, cette cour était un abri, un chez soi, maintenant semblait comme une prison.

Cette énorme porte constituait l’obstacle entre elle et la vérité. Découvrir où son mari était parti. En voiture, notre voiture, sa voiture. La voiture acheté par son père. Et en emportant la clé de cette porte. Il fallait découvrir la vérité ou découvrir le mensonge. Découvrir si ses intuitions l’aie trompé ou non. Découvrir si tout sa vie, tout son mariage a-t-il été basé sur un mensonge. Découvrir la vérité pour voir clair dans sa vie.

Cette porte est trop haute. Elle ne pourra jamais la franchir. Mais il faut ! Il n’y a pas autre voie. Elle a franchi déjà d’obstacles plus durs dans la vie. Elle observa de plus près la porte, tout en essuyant ses yeux d’où les larmes coulaient encore. Il n’y a pas de temps à perdre avec ça ! Les enfants se sont endormis tranquillement. C’est le moment d’agir.

"Sandou est l’autre côté. Est-il seul ? Est-il avec ‘Elle’ ? "

Julie voulait avoir le cœur net. Elle se décida. Julie attrapa le rebord sur l’énorme porte devant elle. Elle s’y hissa, elle glissa. À force de volonté, la volonté de désespoir, elle continuait.

Lentement, elle s’appuya sur un autre rebord, un peu plus haut. Le désespoir lui quintupla ses forces. Heureusement ses chaussures avec talon plastique ne glissèrent pas.

Presque en haut enfin. Et maintenant ? Elle enjamba la porte. Si elle tombait, elle fracturerait une jambe. Ou les deux. Elle n’osa pas sauter, elle était trop haute. Pas de rebords de l’autre côté.

Un moment de panique la submergé. Revenir ? Impossible. C’est encore plus dur. Elle commença à glisser. Ah ! Voilà ce qu’elle devait faire. Se laisser glisser lentement. Elle atterrit sans dégât de l’autre côté.

La petite rue était tranquille. Personne n’observa cette prouesse qui aura paru tout à fait curieuse dans cette petite ville endormie. Et maintenant ?

Il fait sombre et il a commencé à pleuvoir, qu’importe, il pleut dans elle aussi.
___

Je vais à pieds, à la maison de la Madone, la laborantine, la ville est petite, la laborantine habite encore chez ses parents. Son frère m'ouvre :
— Mais ma sœur vient de partir au cinéma avec Sandou...
— Avec Sandou ?
— Oui, ils sont allées au cinéma, comme d’habitude...

Que faire ? Je suis décidée à les trouver coûte que coûte, au cinéma ou au café, où qu'ils soient. Mais comment les trouver sans voiture ? Le cinéma est à trente kilomètres, dans la ville voisine.

Je vais voir Fan, le copain de Sandou (j'écrirai sur lui demain), il n’est pas chez lui, on me dit que ce soir il est allé chez Pierre, le chef de chantier. J’y vais. Fan m’avait raconté que Pierre habitait la maison d’entreprise au centre ville. Pierre a une voiture et il veut bien m'emmener, mais, quand j'ai l'impression à côté d'un champ d'apercevoir ma voiture, il me répond (par solidarité masculin ?):
— Non, ce n'est pas cela; et il ne s'arrête même pas.
Vers 11 heures sans rien trouver, Pierre me dépose à la maison :
— Il reviendra, ne t'inquiète pas.
Je le laisse partir sans avouer que je n'ai pas la clé du haut portail. On a laissé les chiens dehors, ils aboient quand je m’approche de la portail. Je n'ai plus le courage de grimper cette fois-ci.

Je m’assois sous le portail et j'attends recroquevillée dans la nuit. Ce sont les heures les plus sombres de ma vie. Je fais le point, que vaut-il un pareil mariage ?

C’est la nuit quand je me décide à rebiffer, à agir, à réagir. Vers une heure de matin, les patrons de moulin rentrent et m'ouvrent, je m’assois sous les marches de notre maison.

J'attends dans la nuit sombre.

A trois heures de matin, notre voiture entre dans la cour.
Sandou ne peut plus nier, mais il dit :
« J'ai le droit de m'amuser ! Tu ne vas pas me surveiller, m'épier, m'attendre, me faire des reproches. »

J'ai menacé de divorcer et alors il a promis de rompre. Je l’avais cru. J'avais espéré en vain.
C’est le nuit quand je me décide à rebiffer, à agir, à réagir.

Quand je voulus aller nager un dimanche, il l'invita elle aussi, la jeune femme nageait mieux que moi et me dépassât victorieusement dans la piscine.

Quelques mois après, la guerre de 6 jours d'Israël éclata. J'étais angoissée. En même temps, j'espérais qu'on l'appellerait à l'armée et qu'il y resterait. Je ne voyais plus d'autre issue.

Toute la nuit j’ai cherché (variation d’après le bible)

Toute la nuit, j’ai cherché celui que mon cœur aime. Étendu sur mon lit, je l’ai cherché, je ne l’ai pas trouvé ! Il avait disparu pendant mon sommeil. Il faut que je me lève, parcours la ville, ses rues et ses carrefours. Je veux trouver celui que mon cœur aime, mon mari, le seul amant de ma vie.

Je suis allée chez son copain qui bavardait avec d’autres amis. Il n’était pas là. « Nous ne l’avons pas vu ce soir ! » Je suis allée frapper à la porte de sa « copine », une méchante femme jeune et mince au sourire sardonique. Il n’était pas là, elle non plus. « Ils vient de sortir, ils sont partis au cinéma », me dit son frère. Il croyait que j’allais avec eux.

Je l’ai cherché, je les ai cherché, je ne les ai pas trouvé.

J’ai rencontré les gendarmes qui parcourent la ville. « Avez-vous celui que mon cœur aime ? Pour qui mon cœur a du chagrin ? » Non. Personne ne l’avait vu.

Je suis allée devant le cinéma, le séance était presque terminé, on ne m’a pas laissé entrer. J’ai attendu, le cœur serré. Pourquoi a-t-il allé sans moi ?

Je lui avais dit demandé de m’amener, j’avais envie de sortir.
Il m’avait répondu :
« Je dois travailler, cette nuit »
Je me suis couchée. Il a disparu. Mais je n’ai pas réussi à m’endormir.
Les gens sortent de cinéma, j’attends qu’ils arrivent, qu’il arrive, seul ou accompagné. Je saurai, au moins.
— Tout le monde est sorti ?
— Il n’y a plus personne.
Ils n’étaient pas allés au cinéma.
Toute la nuit j’ai erré, j’ai cherché sur les rues et ruelles celui que mon cœur aime. Mon amoureux, mon époux, le père de mes enfants. Toute la nuit je l’ai attendu, l’espoir diminuant d’heure en heure.

Un chagrin noir étreignant mon cœur.

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