HOTEL ASTORIA(1), NEPTUN 16 septembre 1974 Roumanie
Cher Sandou,
D’abord je te dois des excuses tant j’ai tardé de t’écrire. Il est possible qu’au fond c’était intentionnelle. Ce n’était pas de la mauvaise volonté de ma part mais il m’a été très difficile de t’écrire. A la fin, je m’y suis quand même résolue.
Pardonne-moi si mes paroles viennent avec difficulté et s’il sera peut-être dur de les comprendre, mais c’est pour la première fois que je t’écris a toi seul, et en fait je ne sais pas quoi te dire. Je voudrais te dire beaucoup de choses, et je me suis préparé un petit résumé mentalement, mais maintenant que le papier est devant moi, mes pensées ont fui.
Je suis toujours sous l’influence des journées que nous avons passées ensemble, même si elles sont passées depuis longtemps et s’il n’en avait que très peu. Les beaux souvenirs restent en nous et nous n’arrivons pas a les oublier, même si nous le voudrions. Il suffit d’écouter une mélodie ou d’aller a des endroits où nous étions ensemble, pour que les pensées nous envahissent. C’est ce qui m’était arrivée. Je ne veux pas que tu penses que je veux faire de ma première lettre « une lettre d’amour »… Je ne crois pas que telle est mon intention. Je crois que nous sommes des gens assez murs pour ne pas perdre le temps a faire des déclarations puériles. Ne souris pas parce ce j’ai mis que NOUS SOMMES des gens murs… Bien que je sois jeune (tout au moins en années), je me considère mure d’esprit. Je pense que tu me donneras raison. De toute façon, il faut que tu saches que je suis toujours convaincue des problèmes dont nous avons parlé lors de ton séjour dans ce pays. Il est possible que j’aie perdu beaucoup de jours, et même nuits, en y songeant. Souvent je suis arrivée a des solutions qui cependant n’ont pas résisté a une réflexion plus profonde. (Je pense que tu comprends bien de quel problème que parle). Le temps peut tout résoudre. Au fond de moi je pense que j’étais d’accord avec toi quand nous avons parlé de ces choses pour la première fois… J’ai même reconnu que tu avais raison… Mais je n’avais pas assez de courage pour lutter…
J’aurais eu besoin de beaucoup de volonté et de trois fois plus de courage pour faire face a toutes les situations que j’aurais du affronter, même si a la fin mes efforts auraient été récompensés. J’aurais certainement été heureuse… Vois-tu, tout a été trop compliqué pour moi qui avais l’habitude seulement de situations claires et simples. C’était nouveau et inattendu. Et en même temps, trop trop beau. Il est possible toutefois que tu puisses trouver une solution plus simple a ce problème. Peut-être puisque tu est plus mur que moi et connais plus de choses, pourras tu tout résoudre. Ne crois pas que je veux t’endosser tout, mais je sens que je n’ai plus de forces. Je suis encore assez naïve. Je ne sais pas… réfléchissons encore pour savoir ce que nous pouvons faire. Laisse-moi finir cette discussion pour l’instant, au moins jusqu’à ta réponse.
Peut-être attends-tu des nouvelles. Il y en a très peu, mais j’essaie de te les communiquer. D’abord, j’ai commencé les cours à l’école. Tu peux t’imaginer que ça ne me rend pas très heureuse. J’aurais voulu rester encore deux ou trois mois en vacances… Mais lui (Dan) a aussi fini le service militaire et a commencé a travailler aujourd’hui. Autrement tout va bien. Les familles Corduneanu senior et junior sont en bonne santé. La famille Bria également. Voici les nouvelles si l’on peut dire.
Maintenant laisse moi finir, dans l’espoir quand même d’une réponse. Réponds-moi à Bucuresti à l’adresse de Rodica, ci-joint.
Jusqu’à nouvelles que tu m’enverras,
je t’embrasse, Danielle
P.S. S’il te plait, réponds vite. J’ATTENDS ! ! !je t’embrasse, Danielle
Elle a dû mettre à côté cette papier à lettre quand ils étaient ensemble, là...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire