Le jour tant attendu…
Et le jour tant attendu est arrivé, Sandou était enfin avec Julie.
Était-ce son mari ? Celui qu’elle connaissait, aimait, attendait, celui dont elle rêvait ? Qui est cet étranger ? Ce fut un choc.
Secousse dissipée après quelques jours : leur corps se reconnurent. Il s'était détendu, elle s’était rassurée.
Ensuite, il fallait se décider rapidement : que faire ?
Le père de Julie leur promit de les aider matériellement s’ils restaient en Israël. Bien, mais il fallait apprendre la langue du pays. Allons-y, se dirent-ils et ensemble, ils partirent pour l'oulpan Etzion. Ils louèrent une chambre dans le quartier Bakaa de Jérusalem, à côté de l'école de langue ‘Oulpan’ gratuit pour les nouveaux venus et - même pour les touristes qu’ils étaient encore. Pour tous ceux, désireux d’apprendre la langue hébraïque.
Ils faisaient des longues promenades le soir pour la santé du bébé selon la recommandation du docteur et Julie allait faire des exercices de relaxation pour l'accouchement 'sans douleur' (utiles!) et ils découvraient les divers fruits orientaux.
Les études de Julie ont été interrompues par la naissance en octobre de leur fille Agnès. Ils avaient choisi un nom "international" : Agnès en français, Haggit en hébreu, Ágnes en hongrois, Angie en américain..
Le bébé avait trois semaines, à Jérusalem le temps était encore tiède et Julie l’avait sortie pour une heure dans le petit jardinet de la maison où ils avaient loué une pièce. Le bébé s'est endormi et sa mère est rentrée laver ses couches. Lorsque, un moment après, elle perçut un bruit, elle regarda dehors : rien. Quand elle sortie, elle trouva des petits cailloux sur la couverture de son bébé de trois semaines.
La fois suivante, quand elle la sortit, le bébé pleura : encore des cailloux sur sa couverture. Elle surveillait : les enfants palestiniens du voisin jetaient des cailloux sur la petite fille de trois semaines.
Elle alla parler avec les voisins, en vain.
Julie retourna donc chez sa grand-mère à Givataim, là, il n'y avait pas de danger pour le bébé.
Un mois plus tard Sandou, son cours de langue fini, la suivit. Bientôt, il trouva du travail temporaire : le premier, réparer un moulin. Mais un vendredi, le propriétaire religieux partit sans lui payer sa semaine, Sandou n'y retourna jamais. Par la suite, il trouva un travail chez un mécano auto, "profiteur" qui le paya peu : "Les juifs sont des salauds" dit-il à sa femme plus tard, en oubliant l'accueil chaleureux de grand-mère, de la famille entière qui le cajolait ; les copains de Julie devenus les siens qui l'appréciaient.
Un seul cas suffit quelquefois, hélas, pour généraliser, haïr...
Plus tard, la même chose se renouvela avec les hongrois : des douaniers hongrois l'ont tenu un été pendant longtemps à la frontière. Sandou tira la conclusion: "les Hongrois sont impossibles" oubliant la chaleur avec laquelle il était accueilli à chaque fois par la famille Déri ou par leurs copains hongrois d'Israël l’aidant à s'acclimater, tant qu'ils ont pu. Mais il avait entendu quelques personnes (qui ne savaient pas qu'il n'était pas juif) dire : "ces foutus goys".
Et c’est vrai que Julie aussi se dit qu’elle ne doit pas oublier que tous les palestiniens, tous les arabes ne jettent pas des cailloux sur des bébés innocents. Même si cela est arrivé à elle.
Julie ne pourrait jamais assez chanter les joies de l'allaitement, trouver des mots justes et assez forts pour décrire le plaisir de tenir son bébé contre son cœur, voir son premier sourire, ses premiers mouvements ou entendre ses premiers gazouillements. Dorénavant, elle savait, elle était convaincue : c'est un cadeau d’être née femme !
Sandou chrétien, se sentait mal à l'aise en Israël, il désirait retourner en Europe, si possible, aller en France. Mais ils n'avaient pas de l'argent pour payer le voyage. Même en bateaux, cela coûtait plus cher que leur moyens le permettaient.
Il reprochait déjà à Julie : « Pourquoi m'as-tu fait venir, m'as-tu obligée de te suivre en partant!»
Quand Agnès eut dix-huit mois, Sidonie, la grand-mère de Julie est décédée et leur laissa un peu d'argent avec lequel Sandou prit un bateau grec et il est parti essayer de s'établir en France.
Il avait tout juste de quoi vivre pour un mois.
J'avais écrit de journal pendant les deux ans et demi que j'avais vécu en Israel, mais ces deux journaux se sont perdus. Je les avais laissé à ma tante, puisque mon mari ne les aimaient pas, et hélas, ma tante à tournée contre moi. Mais cela c'est encore une autre histoire. Un jour, je vais tâcher de décrire aussi mes souvenirs sur ce temps-là.
2 commentaires:
Sandou, il est parti seul, ou avec Julie et le bébé???
ce n'était pas un homme facile :-(
Et toi, tu devais essayer de faire au mieux .... d'être entre lui, et les autres .....
cela a du être dur malgré tout de vous séparer de nouveau !
Sophos
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