Je me vois, comme si c'était hier, dans ce café du Ham, buvant du vin et moi du thé, Sandou me dit qu’il ne supportait plus, il ne supportera plus, mes pleurs hystériques.
Oui, chaque fois qu’il me frappait, désespérée, perdue, ne sachant pas que faire, surtout humiliée plus encore que meurtrie, j'éclatais en pleurs hystériques et je ne réussissais pas à m’arrêter, à trembler.
— Ne me frappe plus !
— C’est ta faute, tu me provoques !
Je ne saurais probablement jamais la vérité, comment un “brave garçon” est devenu un tyran. Je ne saurais jamais si l’alcool, les copains de là-bas, la famille, mon “mauvais accueil” à son retour, mon désenchantement face à sa trahison, mon désenchantement face à ses comportements, lesquels a eu le plus d’influence, lequel l’a changé tellement.
Il ne réussit pas tant qu’il avait espéré, tant que mon père. Et alors ? Il n’était pas non plus autant estimé et mon travail allait de mieux en mieux.
— Dis-moi Fan, je demandais son ami, pourquoi Sandou me néglige ? Tu devrais te rendre compte.
— Tu t’imagines seulement...
— Je m’imagine ? Je m’imagine quoi ?
— Qu’il te trompe. Non. Ne crois pas ça.
— Ai-je dit ça ?
— Quoi ?
— Je disais qu’il se désintéresse de plus en plus de moi.
— Pourtant t’es si sympa et bonne. Et sérieuse.
— Oui, peut-être. Mais comment savoir ce que je vaux comme femme ?
— Comme femme ? T’es une femme bien.
— Comme amante. Je n’ai eu que lui, Sandou, mon mari, mon seul amant. Toi, son meilleur ami, tu dois le savoir.
— Et alors ?
— Comment savoir si je suis bonne, aussi comme amante ?
— Ne te soucis pas autant.
— Peut-être que je ne lui conviens pas, peut-être je ne sais pas bien faire l’amour.
— Si tu n'étais pas la femme de mon meilleur ami...
— Mais je suis. Nous sommes copains. Restons-le. J’ai besoin d’un copain. Quelqu’un à qui parler, à qui raconter mes tourments.
— Comme je t’ai raconté les miens. Mais t’inquiète pas, il doit être surtout fatigué par les nouvelles analyses laboratoire à découvrir. Sa spécialité ce sont les machines, pas les éprouvettes. Et maintenant il est obligé à se mettre même à ça.
— Justement, au sujet de labo, il y passe énormément de temps. Je lui ai offert mon aide. C’était normal, c’est ma spécialité. Il l’a accepté, une fois. Depuis, il ne veut pas que j’y mette le pied. Étrange.
Fan se sentait aussi abandonné par Sandou, il a commencé à me raconter de plus en plus souvent de son nouveau copain Pierre, le chef des travaux de bâtiments qu’on faisait dans notre usine.
Seul, séparé de sa femme qui l’avait trompé, Pierre avait de temps en temps quelqu’un, mais se sentait de plus en plus solitaire. Un très bon copain et l’avait pas mal aidé à s’habituer en France, vraiment bon. Sous entendu, beaucoup plus que Sandou.
La prochaine fois, j’ai regardé Pierre avec d’autres yeux.
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