20 août 1963

Mon amour, je t’écris plein des lettres dans ma tête et maintenant je me suis décidée à la mettre enfin sur papier. Les pensés volent plus vite. Je pense énormément, souvent, à toi, je te donne des baisers, mon cher garçon. Essai de te dire que ça te fait rien, que tu n’a tant de désir, prend et lis un roman pris du grenier. Ou alors essaie de bavarder avec les gens autour ou des environs.

Agnès est très active et travailleuse, s’agite tout le temps, cela ne veut rien dire, moi aussi j’étais comme de vif-argent jusqu’à mes 17 - 18 ans, je me suis assise seulement après. Elle parle énormément, presque tout hébreux, je m’étonne qu’elle a réussi à assimiler ce trésor de vocabulaire de d’expressions, mais elle sait aussi la roumain et au besoin elle la parlera.

Je comprends combien tu peux te sentir seul mon amour, puisque à moi elle me remplie toute la vie et je me languis et tu ne l’as même pas elle à côté de toi. Je crois que pour le début c’est bien d’avoir trouvé même là, jusqu’à tu apprenne mieux la langue, si tu crois qu’on peut résoudre les choses officielles pour une année, il ne vaut pas la peine qu’on reste séparés et une fois résolus toutes les problèmes ici nous devrions aller là, nous aussi.

Ce n’est pas important ce que dit papa. Il a des préjudices. Je croyais qu’il avait changé un peu mais je vois que non, hélas. Seulement pour Agnès le pèlerinage n’est pas très bon, elle se sent très bien ici mais elle est encore petite et je crois qu’après un temps elle se sentira bien partout. Je suis impatient que tu la voies. Encore quelques jours, elle ira à l’école maternelle (le sept) j’attends avec impatience. Si je pouvais j’irai quelquefois à la mer entre-temps.

Sache qu’on ne peut presque pas voir la différence, mes cheveux étaient très foncés même avant. (Je n’ai pas encore de réponse de toi mais j’ai un peu peur de ton réaction.) Mais que diable, je suis majeure dorénavant ! J’étais chez Irène et jusqu’à ce que je ne lui dit pas elle ne s’en ai même rendu compte, tant la différence est petit.

Je t’aime beaucoup, beaucoup et que ne donnerais-je pour que tu sois avec moi et puisse me caresser comme tu l’as dit dans ton dernière lettre. Il est onze heures et demi du soir et chaud, mais mes pieds sont froids et mes seins soupirent auprès toi. Mais nous allons nous rencontrer et je t’embrasserai encore et encore.

Tu vois que c’est bête d’écrire la nuit. N’y fait pas attention.

L’après-midi quand j’ai commencé à t’écrire Agnès est intervenue et a dessiné dessus et finalement j’ai dû l’interrompre.Arrange-toi les affaires sans penser que la plus important est notre rencontre, maintenant le principal est de te trouver un travail te satisfaisant et un lieu que t’aime, même si pas sur le moment, au moins en perspective. J’espère que la visite chez papa ne t’a pas trop déçu (je vois de sa dernière lettre qu’il est encore contre tout comme avant.) Dommage de toute façon qu’il ne peut être objectif et t’aider et conseiller.

As-tu encore quelque chose de Roumanie ? Moi rien depuis le premier juillet. C’est vrai, je n’ai pas écrit qu’un carte postale.J’ai acheté très bonne par cher deux albums et j’y mettrai nos photos. J’ai reçu le négatif envoyé par toi, je n’ai pu rien faire avec, je dois acheter de révélateur, fixateur et avoir envie de m’en occuper. Autrement dit, disposition.Mon cher garçon, que ne ferais-je pouvoir te conseiller, remplacer tout dont tu as maintenant besoin mais je ne le peux hélas pas. Je peux avoir à la fois nombreuses fonctions en même temps, mais pas tous. Peut-être Ila pourrait être de bon conseil, elle est très intelligente, mais seulement si tu réussis à lui parler séparément, l’éloigner des autres. Je crois de toute façon que pour un certain temps au moins, il est décidé ce que tu feras, seulement moi je ne le sais pas encore, je recevrai des lettres de toi seulement en quelques jours.

Je t’embrasse avec amour,Judit

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