22 juin 1988 (recopié dans le journal d’une feuille de papier écrit dans un café)
Ça sert à quoi de recevoir un coup de poing sur l’épaule de quelqu’un avec qui l’on vit depuis cinq mois; avec qui l’on voulait vivre jusqu’à la fin de ses jours, avec qui on croyait vivre le plus parfait amour possible et réciproque?
De me rendre compte que François a un tempérament coléreux.
Que je doive réviser, réfléchir: est-il « bon » ou est-ce seulement moi qui le vois tel? Est-ce inné cette colère et ce comportement? Est-ce seulement quand tout va exactement comme il le veut et qu’on lui obéit qu’il est gentil?
Je vois tout d’un coup plein de choses, en somme TOUT, sous une autre lumière. Hélas, moins belle, mais probablement plus réelle. Mon rêve y est aussi pour quelque chose. J’ai fait des pas géants vers lui, je saute dans l’autre camp, attention! Vaut-il le sacrifice, la peine?
Pourquoi agit-il comme cela et pourquoi dit-il « je t’aime, je t’aime »? Quels sont les mots et quels sont les faits? Où sont les mots et où sont les faits? Ce que j’ai fait moi, comment j’ai changé ma vie pour lui - et qu’a-t-il fait lui, fait et pas dit?
D’un autre côté, ai-je assez attendu, n’est-ce pas trop demander? Trop vite il est retombé de nouveau dans l’état nerveux épouvantable dans lequel je l’ai connu. Qu’est qui a provoqué cet état? Comment l’éviter?
Où? Où alors je me suis complètement trompée et j’ai vu un homme admirable, bon, sage, intelligent, beau, compréhensive et chaud, alors que le vrai François est coléreux, méchant, manipulateur, combinateur, dominateur et égoiste, tout à fait insensible à autrui?
Me suis-je bercée de nouveau d’un rêve?
Je crois toujours qu’il y a des rêves qui se réalisent, qu’il y a des réalités encore plus belles que n’importe quel livre. Mais peut-être, tout cela n’est-il qu’un leure, illusion, autosuggestion, et la réalité est moche et nous le fait savoir à chaque fois, nous secoue « réveille-toi! »
Trop de bonheur n’est pas admis!
Julie, tu dérailles, tu rêves. Crois-tu qu’il y a des êtres intelligents? Crois-tu qu’il existe un homme à qui tu peux tout dire, tout avouer, avec qui tu peux tout partager, qui va te supporter et pas en profiter, qui aime autant que toi partager, discuter? Ha, ha, ha.
Des prétextes, on peut toujours en trouver à tout.
Ce qui me fait le plus mal, et ça me fait même trop mal maintenant pour que je réfléchisse tranquillement avec tout mon intelligence - du moins ce kyu dont dans ma lucidité je suis capable, c’est l’imprévu de ce qui vient d’arriver et la question la plus déchirante qui se pose à moi: me suis-je trompée de nouveau?
Ai-je mis toute ma confiance de nouveau dans la mauvaise personne, lui ai-je accordé trop de confiance? Oui, trop, c’est sûr. Trop de quelque chose n’est jamais bon. Trop de bonheur se paye!? Plus on est haut, plus ça fait mal de tomber. C’est sûr. Le reste?
Julie, attention, réfléchis davantage sur ta vie.
Et puis, il m’arrive un autre coup. Il parait que dans quelques mois je risque de ne pas pouvoir bouger un bras. Grave? Passager? Définitif? Mais qui bouleverse de nouveau tout. J’ai peur des douleurs. Et je me rappelle maintenant la première réaction:vraie, naturelle, qu’il a eue en l’apprenant: « et j’aurais voulu m’amuser encore beaucoup: » (et pas vivre avec un malade). Donc sa réaction n’était pas le regret pour quelqu’un qu’on aimerait mais l’égoïsme « naturel » hélas de quelqu’un qui se soucie surtout pour soi-même. Tous sont naturellement ainsi.
Comme le monde me paraît moche d’un coup.
Mais pas tous, pas toutes surtout! Je suis sûre quand même que si j’étais gravement malade, la réaction de mes vraies amies, et j’en ai, ainsi que celle de mes enfants, ne serait pas celle-là. Mais lui, bien sûr, ne m’a pas connue, n’a pas eu encore beaucoup de temps pour m’aimer. Puis, entre un homme et une femme, existe-il une vrai amitié? Maintenant, je me le demande. Mon fils ne m’abandonnera pas. Et Stéphanie, Agnès non plus. Ni Anna. Je ne crois pas quand même que François s’en aille. On verrait.
Mais peut-être que tout cela n’est-il pas sérieux, seulement une alerte. Pour me faire réfléchir sérieusement de nouveau: « Qu’est-ce que je veux faire encore dans le temps -long ou court- qui me reste à vivre?
De toute façon, reconnaissons-le, depuis quelques mois j’ai eu, il m’a donné, beaucoup de joie. Vraie ou fausse, quelle importance. Ma joie a été vraie.
"Que ma joie demeure" - autant que possible…
N'ayez pas peur, cela ne s'était jamais plus réproduit, était-ce parce qu'il n'était pas aussi coléreux que ça ou parce qu'après avoir expliqué ce que j'ai vécu avec Sandou il voulu me démontrer qu'il était tout à fait différent, je ne le sais pas... et mon épaule ne n'était pas immobilisé non plus, comme mon docteur me l'avait prédit.
La discussion entre nous qui a provoqué son collére et gesticulations était dû au motifs professionels: il voyait loin dans l'avenir mais je devais agir selon ce qu'était ce jour pour l'entreprise... et il a mal pris que je ne tiens pas compte et ne crois pas à ce qu'il disait, prédisait au sujet des stations de travail plus importants que l'ordinateur personnelle.
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