émigrer ou pas?

28 février 1958
Enfin j'ai fini mes derniers examens de cette session. J'ai réussi à remettre mon amour propre d’aplomb avec deux 10 beaux et ronds. Il est vrai que c’était des sujets plus faciles, mais c'est quand même deux jolies notes 10 sur 10. Il faut continuer ainsi ! J'ai décidé que la dernière année, je serais de nouveau très bonne étudiante... Je l'ai été les deux premières, la première et la dernière impression comptent davantage.

Ce ne sera pas de tout repos. J'ai encore deux sujets difficiles et deux faciles devant moi, mais il faut du temps d'étude même pour ces derniers. Je me suis rendu compte qu'on peut mieux apprendre avec d'autres, j'essaierai de continuer ainsi.


Je pourrais être si heureuse, pleine de bonheur, et je le serais si ma mère n'avait pas recommencé à me tourmenter. Elle abîme ma joie. Elle croit bien faire ‘m'aider’ mais à chaque fois elle me rend seulement nerveuse, et finalement, ce qu'elle dit ne compte pas, ni d’ailleurs ce que je veux, moi. Ce qui comptera, c’est ce qu'ils vont vouloir eux, en haut[1]. Je suis, convaincue malgré tout, que pour moi ça se terminera bien, d'une façon ou de l'autre. Mais ça pourra aussi tourner mal. Comment savoir ?
Si je dois travailler pendant les mois suivants, il ne me restera pas assez de temps pour étudier et finir ma soutenance de diplôme en juillet ; si je n’y vais pas, je pourrai étudier, mais maman continuera de me tourmenter. Alors mieux vaut encore retourner travailler sans demander un congé supplémentaire, pour ne pas devoir écouter chaque jour le même disque. Finalement retourner pour quelques semaines ne peut me faire si mal. Je commencerai à étudier les colorants, je vais le préparer et alors ne devrais plus le reprendre jusqu’aux examens. Peut-être, pourrais-je quand même, terminer tous mes examens en juillet ?
J'ai mal à la main d'avoir autant écrit (pas dans mon journal mais pendant ces quarante derniers jours pour mes études, ma thèse). Je dois encore reprendre la pharmacie, recopier le cahier, revoir ensuite la mécanique, avec les autres filles. Je suis libre, quand elles le préfèrent. J’ai mal aux yeux. Il faudra aller chez le coiffeur, mais quand ? Cette après-midi, j’ai des billets pour le ballet de glace.

9 mars
Je me disais que c’était seulement Eugène ainsi : quand on le rend jaloux, on le jette dehors, alors il commence seulement à être intéressé par une fille. Il paraît, les autres garçons sont aussi comme cela. Les gens, n’ont-ils pas de fierté ? Où seulement moi, je n’ai pas eu la chance de rencontrer des gens fiers ?

[1] Émigrer ou pas, demander ou pas : maman avait une opinion, papa un autre. En plus elle craignait que je ne perde mon poste en prenant des congés longs pour les examens.

1 commentaire:

Julie Kertesz - me - moi - jk a dit…
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